La mise à l’arrêt de la raffinerie de Pancevo, la seule du pays, met en péril l’approvisionnement énergétique de la Serbie, tout en exposant son économie à de fortes turbulences. Exploitée par Naftna Industrija Srbije (NIS), l’entreprise pétrolière détenue majoritairement par des actionnaires russes, l’installation ne traite plus de brut depuis le 9 octobre en raison de sanctions imposées par les États-Unis. Washington conditionne la levée de ces mesures à un retrait total des groupes russes Gazprom Neft et Intelligence, qui détiennent environ 56% du capital de NIS.
La raffinerie couvre habituellement 80% de la demande nationale en carburants. Son arrêt oblige Belgrade à accroître massivement ses importations de produits pétroliers raffinés, ce qui accroît la pression sur le budget de l’État. Selon le rapport annuel de l’entreprise, NIS et ses filiales ont contribué en 2024 à hauteur de plus de €2bn ($2.16bn) aux finances publiques, soit près de 12% du budget national.
Le système financier national exposé à des sanctions secondaires
Au-delà des enjeux énergétiques, le maintien des opérations financières de NIS soulève la menace de sanctions secondaires. Si la Banque nationale de Serbie continue d’autoriser l’entreprise à effectuer des transactions, Washington pourrait inscrire l’institution sur une liste noire, ce qui impliquerait un isolement des marchés internationaux, un gel des actifs étrangers et une interruption des flux financiers.
Aleksandar Vucic, président de la République de Serbie, a déclaré que NIS serait autorisée à poursuivre ses transactions jusqu’à la fin de la semaine en cours, principalement pour le paiement des salaires et fournisseurs. Toutefois, aucune solution structurelle n’a été annoncée concernant l’avenir de l’entreprise dans ce contexte de blocage des actionnaires russes.
Menace directe sur l’emploi et les stations-services
NIS emploie environ 13 500 personnes en Serbie et exploite près de 20% des quelque 1 500 stations-service du pays. Un arrêt prolongé de la raffinerie pourrait entraîner des licenciements et perturber la distribution nationale. L’État a déjà inscrit une enveloppe de €1.4bn ($1.51bn) dans son budget 2026 pour racheter les parts russes si les négociations échouent, après avoir vendu ces mêmes parts en 2008 pour €400mn ($432mn).
Une suspension partielle des sanctions américaines contre Lukoil, annoncée récemment, a toutefois apporté un répit partiel au secteur. Elle permet à ses 112 stations-service situées en dehors de Russie, dont celles de Serbie, de fonctionner jusqu’au 29 avril 2026.
Approvisionnement en gaz sécurisé à court terme
Dans le même temps, la Serbie a sécurisé ses besoins en gaz naturel, qui couvrent plus de 92% de la consommation nationale, via un accord de court terme à signer prochainement avec Moscou. L’actuel contrat expirant en fin d’année, cette annonce vise à rassurer sur la continuité de l’approvisionnement durant l’hiver.
Face à l’impasse, Belgrade a fixé une échéance à la mi-janvier pour une éventuelle cession des parts russes de NIS. Des investisseurs hongrois et émiratis auraient manifesté leur intérêt, selon le président Vucic.