La major française TotalEnergies, qui vient d’annoncer 4,1 milliards de dollars de bénéfice net au deuxième trimestre, est toujours le deuxième plus gros acheteur de gaz naturel liquéfié (GNL) russe, dénonce jeudi l’ONG Global Witness, qui appelle l’Europe à interdire ce commerce pour éviter d’alimenter « la machine de guerre » de Moscou.
Les rouages controversés des importations de GNL russe par TotalEnergies
L’ONG reproche à la société d’engranger des profits en partie grâce à ses importations de GNL depuis la Russie où elle est liée à un contrat de long terme dans l’immense champ géant gazier de Yamal en Sibérie arctique. « Le GNL continue d’être une source de revenus clé pour le Kremlin et sa guerre en Ukraine », martèle Global Witness dans un communiqué en réitérant « ses appels à l’UE et à ses États membres, dont la France, pour qu’ils interdisent les importations et le commerce de GNL russe » par ses entreprises.
Depuis le début de l’année, « Total a acheté près de 4,2 millions de mètres cubes de GNL russe », ce qui fait de la compagnie « le deuxième plus grand acheteur de GNL dans ce pays » juste derrière la Russie, indique l’ONG basée à Londres. Global Witness a analysé les données de Kpler, un cabinet d’expertise dans les matières premières, qui suit notamment le ballet des cargos méthaniers dans le monde.
La frénésie du gaz russe : impact et emprise sur TotalEnergies
L’année 2022 se marque par une ruée mondiale vers ce gaz transporté par bateaux après la décision de Moscou d’assécher ses pipelines vers l’Europe, en représailles aux sanctions internationales dans la foulée de l’offensive russe en Ukraine. Avec cette course au gaz, les prix ont flambé, dopant les profits des majors occidentales dont TotalEnergies en 2022.
En 2022 comme en 2023, TotalEnergies a effectué le plus gros de ses imports de GNL depuis les États-Unis (respectivement 21,1 et 10 millions de mètres cubes), suivis par la Russie (12 et 4,2 millions de mètres cubes). Même en baisse par rapport à 2022, ces importations depuis la Russie « représentent toujours près de 20% de tout le GNL que Total a acheté » dans le monde, relève l’ONG.
TotalEnergies face à la controverse : investissements en Russie et positionnement sur le marché du GNL
« L’entreprise continue d’acheter du gaz russe, envoyant de l’argent à la machine de guerre russe », dénonce Jonathan Noronha-Gant, chargé de campagne chez Global Witness. TotalEnergies, troisième acteur mondial du GNL, parie depuis plusieurs années sur le gaz, aux États-Unis, au Moyen-Orient et en Russie. Dans ce pays, il détient toujours 20% dans le champ gazier de Yamal LNG, au côté de la société privée russe Novatek (50,1%), « conformément aux décisions de l’UE de maintenir à ce stade les approvisionnements en gaz russe » liquéfié, rappelle le groupe.
TotalEnergies les assument, soutenant que l’Europe en a besoin, faute d’en avoir par les gazoducs. « Si nous décidions de ne pas prendre les volumes de gaz, nous serions quand même obligés de les payer », justifie aussi la société.