La Commission européenne a présenté un plan visant à éliminer l’ensemble des importations de gaz russe d’ici fin 2027. Cette décision marque une nouvelle étape dans la politique énergétique de l’Union européenne, trois ans après le début de l’invasion de l’Ukraine. Le gaz russe représentait encore 9% de la consommation de gaz de l’Union entre janvier et avril 2025, selon le cabinet Kpler.
Un recul progressif mais incomplet depuis 2021
Avant le conflit ukrainien, la Russie fournissait 45% du gaz importé par l’Union européenne, en combinant les livraisons par gazoducs et celles de gaz naturel liquéfié (GNL). En 2024, la Russie restait le deuxième fournisseur de gaz de l’Union, derrière la Norvège, avec 18% des livraisons par gazoducs et 20% des approvisionnements en GNL, selon l’Institute for Energy Economics and Financial Analysis (IEEFA).
Le gaz russe reste utilisé pour le chauffage domestique, l’industrie et la production d’électricité. Malgré la réduction des flux par gazoducs, notamment avec l’arrêt du transit via l’Ukraine au 1er janvier 2025, les volumes de GNL russe livrés aux ports européens n’ont pas cessé.
Une stratégie reposant sur le GNL
L’UE s’est fortement tournée vers le GNL à la suite de la crise énergétique de 2021. En 2024, 37% des importations de gaz de l’Union provenaient de GNL, contre 63% par gazoducs. Le marché du GNL demeure toutefois sous tension. D’après l’analyste Jan-Eric Fähnrich de Rystad Energy, l’offre ne devrait devenir excédentaire qu’à partir de 2028.
Les États-Unis, qui assurent 45% des importations européennes de GNL, restent les principaux partenaires, suivis du Qatar. La Norvège, l’Afrique du Nord et potentiellement le Mozambique pourraient contribuer à diversifier l’approvisionnement. Le commissaire européen à l’Énergie Dan Jorgensen a déclaré vouloir éviter toute nouvelle dépendance, y compris vis-à-vis de Washington.
Des obstacles juridiques et politiques
Le plan prévoit l’interdiction de nouveaux contrats avec les entreprises russes et des contrats à court terme à partir de fin 2025. L’arrêt total des importations est ensuite fixé à 2027. Cette feuille de route, soumise au Parlement européen et aux États membres, implique des négociations sensibles. Certains pays comme la Hongrie, encore proches de Moscou, pourraient freiner l’adoption du texte.
Bruxelles privilégie une proposition législative, qui requiert une majorité qualifiée, plutôt que des sanctions qui imposeraient l’unanimité des 27. Une partie des contrats en cours, notamment ceux conclus avec Shell, TotalEnergies, SEFE et Naturgy, pourrait susciter des débats juridiques sur leur résiliation.
Concentration des flux et dépendance résiduelle
L’Agence internationale de l’Énergie note que la Belgique, la France et l’Espagne ont accueilli 85% des importations totales de GNL russe depuis le début de l’année. Une fraction de ces volumes a ensuite été réexportée vers d’autres pays européens, ce qui soulève la question de la traçabilité et de l’application effective du plan.
« D’ici à 2028, nous devrions entrer dans une phase d’offre excédentaire de GNL au niveau mondial », a indiqué Jan-Eric Fähnrich à l’AFP, tout en rappelant que les projets en cours ne seraient opérationnels qu’à partir de 2026 ou 2027.