Les importateurs de gaz naturel liquéfié (GNL) du Japon intensifient leurs stratégies d’optimisation commerciale pour compenser la baisse persistante de la demande intérieure. Plusieurs sociétés gazières japonaises se tournent vers des échanges flexibles tels que les swaps temporels, géographiques et qualitatifs, dans le but de maximiser la valeur de leurs cargaisons excédentaires et de gérer plus efficacement les stocks.
Les utilities japonaises actives sur le marché des swaps
En période de marché en contango, ces stratégies permettent aux entreprises de tirer parti des écarts de prix entre les mois de livraison. Par exemple, un écart de 20 cents par million de British thermal units (MMBtu) a été observé entre les livraisons de fin novembre et décembre, permettant théoriquement de générer un profit équivalent pour chaque cargaison optimisée. Les compagnies gazières, disposant de capacités de stockage plus souples que les producteurs d’électricité, sont les plus actives sur ce segment.
En septembre, Kansai Electric Power Company a réalisé une opération combinée de swap temporel et géographique, vendant une cargaison chargée à Cove Point aux États-Unis pour fin octobre, tout en en acquérant une autre à destination du Japon avec une livraison anticipée. Cette approche permet non seulement d’ajuster les disponibilités en amont, mais aussi de réorienter les flux vers les marchés offrant les meilleures marges.
La gestion des stocks devient un enjeu majeur
Plusieurs importateurs japonais signalent un remplissage excessif des réservoirs, rendant difficile la réception de nouvelles cargaisons. Le recours au swap temporel permet dans ce contexte de repousser les livraisons. Par ailleurs, certains opérateurs indiquent devoir échanger des cargaisons pour en obtenir avec une valeur calorifique plus élevée, essentielle au maintien des spécifications techniques du réseau.
Le Japon a importé 66,9 millions de tonnes de GNL en 2024, soit une hausse de 1,2 % sur un an. Toutefois, la tendance structurelle reste orientée à la baisse depuis 2012, en raison de la reprise du nucléaire, du développement des énergies renouvelables et du ralentissement industriel.
Des contrats plus courts pour limiter les risques
Sur la période 2025-2030, 20,37 millions de tonnes par an de contrats de GNL expireront. Pour combler ce déficit, les entreprises japonaises lancent des appels d’offres visant des engagements plus courts. Hokkaido Gas et Shizuoka Gas ont ainsi recherché des contrats de sept ans, nettement inférieurs à la durée moyenne des contrats en cours, qui est de 14 ans. Ces entreprises ciblent des cargaisons livrées selon les modalités « Delivered Ex Ship » (DES), offrant une meilleure visibilité sur les coûts.
Certaines sociétés hésitent à s’engager au-delà de 15 ans, en raison de l’incertitude réglementaire liée aux engagements climatiques du pays. En revanche, JERA, principal producteur d’électricité du Japon, a récemment signé un accord d’approvisionnement jusqu’à 5,5 millions de tonnes par an avec quatre exportateurs du golfe du Mexique, pour une durée de 20 ans. Ces contrats, en « Free On Board » (FOB), permettent une flexibilité accrue pour ajuster les routes maritimes en fonction de la demande régionale.
Le contexte commercial et géopolitique influence les décisions
La décision de JERA intervient peu après des discussions bilatérales sur le commerce et la sécurité économique entre les États-Unis et le Japon. Les termes FOB sans restrictions de destination offrent aux importateurs une marge de manœuvre logistique supplémentaire, dans un contexte où les routes commerciales classiques, notamment via le cap de Bonne-Espérance, sont restées peu rentables cette année.
Les livraisons américaines vers le Japon ont chuté de moitié sur les neuf premiers mois de l’année, atteignant 2,65 millions de tonnes contre 5,28 millions un an plus tôt. Les prochaines expirations contractuelles concernent notamment Kansai Electric, Tokyo Gas et JERA, avec des volumes significatifs issus des projets Pluto LNG, North West Shelf et Qalhat LNG.