Le site industriel de Duolun, opéré par China Datang Corporation Ltd., combine 150 MW d’énergie éolienne et solaire à une installation d’électrolyse alcaline afin de produire environ 6 300 tonnes d’hydrogène vert par an. Cette production est injectée dans une unité existante de méthanol issue du charbon, réduisant la dépendance à l’hydrogène « gris » et offrant un débouché industriel aux excédents renouvelables de Mongolie intérieure. Ce démonstrateur est le premier en Chine à intégrer l’hydrogène vert dans un complexe charbon-chimie à échelle industrielle.
Réduction du curtailment et intégration industrielle
Le projet fonctionne grâce à treize électrolyseurs alimentés en électricité renouvelable, permettant une réduction annoncée d’environ 129 300 tonnes de dioxyde de carbone par an. Cette configuration s’inscrit dans une stratégie de verdissement marginal, consistant à diminuer l’intensité carbone sans remettre en cause la structure charbonnière du procédé. Elle répond aussi à un besoin économique : valoriser une production renouvelable peu rémunératrice sur le réseau national chinois.
Positionnement stratégique de la Mongolie intérieure
Ce démonstrateur s’inscrit dans les feuilles de route régionales visant à faire de la Mongolie intérieure un pôle de production d’hydrogène vert, avec un objectif annoncé de 480 000 tonnes par an d’ici 2025. Le projet Duolun figure parmi les premiers projets pilotes reconnus par l’administration centrale, lui assurant un accès prioritaire aux subventions d’investissement (CAPEX) et d’exploitation (OPEX), renforçant ainsi sa visibilité auprès des acteurs institutionnels et privés.
Effets économiques sur la chaîne de valeur
À l’échelle du marché chinois, dominé par une production d’hydrogène principalement fossile (plus de 30 Mt/an), l’apport de Duolun reste marginal. Toutefois, le projet permet de tester la rentabilité de l’intégration de technologies vertes dans des sites industriels à forte intensité capitalistique, ce qui pourrait orienter de futurs investissements. Le coût estimé de production d’hydrogène vert en Chine reste entre $2,3 et $7,4/kg, largement au-dessus du coût de l’hydrogène gris.
Accélérateur pour les fournisseurs technologiques
Duolun renforce la position des fabricants chinois d’électrolyseurs et des intégrateurs de systèmes de contrôle industriels. Les technologies utilisées (management multi-électrolyseurs, couplage avec la chaîne méthanol) sont susceptibles d’être exportées comme solutions clés en main dans d’autres régions intéressées par l’hydrogène vert à usage industriel, notamment en Asie centrale et au Moyen-Orient.
Positionnement financier et gouvernance interne
China Datang Corporation Ltd. utilise le projet pour améliorer son profil d’émetteur de transition auprès des investisseurs institutionnels. L’actif est aligné avec plusieurs critères ESG (environnement, social, gouvernance) et renforce la part de projets bas carbone dans le portefeuille du groupe. Il permet également de stabiliser les flux de revenus issus des renouvelables en contournant les pertes liées au curtailment.
Risque d’exposition à la régulation future
Duolun reste cependant adossé à une infrastructure charbon-chimie fortement capitalisée. Un durcissement du cadre réglementaire chinois après 2030, avec des plafonds absolus d’émissions ou un prix carbone plus élevé, pourrait compromettre la viabilité économique du site malgré l’intégration d’hydrogène vert. La reconnaissance des volumes d’hydrogène renouvelable dans la comptabilité carbone sera donc déterminante pour maintenir l’éligibilité du projet à des financements de transition.
Vers une réplication nationale du modèle
Le modèle de Duolun pourrait être répliqué dans d’autres provinces à forte concentration charbon-chimie, notamment dans le Ningxia, le Shaanxi ou le Xinjiang. Un tel déploiement favoriserait une réallocation du capital vers des infrastructures hybrides alliant charbon, hydrogène vert et méthanol. Cette stratégie permettrait à la Chine de proposer à l’export des produits chimiques à plus faible intensité carbone, en anticipant les futures restrictions à l’importation basées sur le contenu carbone.