Le Sri Lanka a annoncé qu’aucune importation de gaz naturel liquéfié (GNL) ne sera effectuée depuis l’Inde dans un avenir proche, en raison de retards dans la mise en place des infrastructures nécessaires, notamment l’absence d’unités de stockage. Le ministre sri-lankais de l’Énergie, Kumara Jayakody, a précisé que la construction du terminal de stockage, condition préalable aux livraisons, n’a toujours pas démarré.
Les blocages contractuels freinent les ambitions gazières
Les discussions concernant l’infrastructure avaient été engagées sous l’administration précédente, mais aucun contrat n’a été finalisé à ce jour. Le ministère de l’Énergie évalue actuellement les documents hérités, les propositions de sites et les modalités financières. Selon les estimations initiales, l’édification d’une installation de stockage pourrait nécessiter au moins trois ans, ce qui repousserait les premières livraisons de GNL au-delà de 2028.
Le recours au GNL devait permettre d’alimenter des centrales à cycle combiné et de remplacer le fioul lourd et le charbon, qui dominent encore les 4 GW de capacité installée du pays. Des projections internes indiquaient une réduction possible des coûts de production allant jusqu’à 20 %, mais sans terminal de regazéification, ces objectifs ne peuvent être atteints. Les autorités restent dépendantes de combustibles liquides plus onéreux.
L’accord indo-sri-lankais confronté à l’immobilisme
L’Inde avait pris des engagements fin 2024 pour approvisionner le Sri Lanka en GNL, dans le cadre d’un plan énergétique régional incluant également une interconnexion électrique et un oléoduc transfrontalier. Un contrat de cinq ans avait été signé entre Petronet LNG, opérateur public indien, et LTL Holdings pour alimenter les centrales de Colombo. L’investissement prévisionnel pour un terminal flottant de regazéification (FSRU) était évalué à INR 2 500 crores (environ LKR9 milliards), avec une mise en service initialement prévue pour 2028.
Cependant, le projet n’a pas progressé. Les équipes bilatérales se concentrent désormais sur l’étude d’une liaison électrique à haute tension entre l’Inde et le nord du Sri Lanka. Pendant ce temps, le volet gazier reste en suspens. Cette situation affecte non seulement les besoins immédiats du Sri Lanka en énergie, mais également la coopération régionale, à un moment où l’Inde cherche à optimiser sa capacité excédentaire d’exportation de GNL.
Conséquences économiques et tensions géopolitiques
L’impasse actuelle s’inscrit dans un contexte de tensions commerciales et stratégiques plus larges. En 2022, Colombo avait brièvement attribué un projet similaire à un consortium sino-pakistanais, suscitant des réticences à New Delhi avant de revenir à une solution indienne. Cette instabilité dans les procédures d’attribution et l’influence croissante de la Chine dans les infrastructures portuaires de l’île, notamment à Hambantota, compliquent l’environnement pour les partenaires régionaux.
Les données de la Ceylon Electricity Board estiment que le GNL pourrait représenter jusqu’à 2,6 millions de tonnes par an d’ici 2030, permettant d’économiser jusqu’à USD 500 millions par an en importations de pétrole. En l’absence d’avancée sur le stockage, les tarifs d’électricité — actuellement autour de LKR 50 à 60 par unité — risquent d’augmenter davantage, accentuant la pression sur les ménages et les entreprises.
Un horizon incertain pour l’intégration énergétique
Depuis la crise économique de 2022, le Sri Lanka tente de diversifier ses sources d’approvisionnement énergétique. L’accord avec Petronet LNG devait accompagner la montée en puissance du parc de production, ciblé à 7 GW d’ici 2025, via des solutions thermiques et renouvelables. Mais les suspensions d’appels d’offres, les changements d’orientation politique et l’absence de décisions financières concrètes ralentissent les avancées attendues.
Les groupes de travail bilatéraux doivent se réunir à nouveau pour accélérer les études de faisabilité. Si la construction du terminal démarre rapidement, les premières livraisons pourraient avoir lieu fin 2028. D’ici là, le Sri Lanka pourrait se tourner vers des importations temporaires de pétrole ou des projets renouvelables locaux, en suivant de près l’évolution des prix mondiaux du GNL, actuellement estimés entre USD 12 et 14 par million de British thermal units.