L’alliance OPEP+ a vu sa production de pétrole brut diminuer de 140 000 barils par jour (b/j) en juillet pour atteindre 41,65 millions de b/j, selon l’enquête mensuelle Platts de S&P Global Commodity Insights publiée le 11 août. Cette baisse intervient paradoxalement alors que le groupe accélère le retrait progressif de ses coupes volontaires de 2,2 millions de b/j initiées en novembre 2023. L’Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP) a enregistré une réduction de 190 000 b/j mensuellement, principalement attribuable à une diminution de 300 000 b/j de l’Arabie Saoudite qui avait augmenté sa production en juin pour parer à d’éventuelles perturbations d’approvisionnement liées au conflit Iran-Israël.
Conformité mitigée et plans de compensation
Les pays soumis à des quotas produisent actuellement 380 000 b/j en dessous de leur objectif collectif, une situation qui masque des disparités importantes entre membres. L’Irak maintient sa production en deçà de son quota malgré l’augmentation autorisée, cherchant à accélérer son plan de compensation pour surproduction antérieure. Des frappes de drones sur des champs clés dans la région semi-autonome du Kurdistan ont affecté la production irakienne en juillet, estimée à 3,99 millions de b/j incluant environ 150 000 b/j du Kurdistan. Le Kazakhstan, autre surproducteur chronique, a vu sa production baisser à 1,81 million de b/j mais reste 296 000 b/j au-dessus de son quota de 1,514 million de b/j.
La Russie a légèrement augmenté sa production de 70 000 b/j pour atteindre 9,07 millions de b/j, restant néanmoins 170 000 b/j en dessous de son quota fixé à 9,240 millions de b/j. Les Émirats arabes unis (EAU) ont augmenté leur production de 100 000 b/j à 3,19 millions de b/j, dépassant légèrement leur quota de 21 000 b/j. Seuls l’Arabie Saoudite et les EAU disposent de capacités excédentaires significatives pour augmenter leur production, l’Agence internationale de l’énergie (AIE) estimant la capacité excédentaire saoudienne à 3,1 millions de b/j et celle des EAU à 1,1 million de b/j sur une capacité totale de l’OPEP de 5,3 millions de b/j.
Production record libyenne et dynamique des prix
La Libye, exemptée de quotas en raison de son instabilité politique, a atteint un nouveau sommet en 12 ans avec une production de 1,25 million de b/j en juillet. Cette performance remarquable intervient 14 ans après la chute de Mouammar Kadhafi qui avait paralysé le secteur pétrolier vital du pays. L’Iran et le Venezuela, également exemptés de quotas, ont maintenu des niveaux de production relativement stables à 3,24 millions de b/j et 910 000 b/j respectivement.
L’OPEP+ navigue dans un environnement de prix volatil marqué par les conflits au Moyen-Orient et en Ukraine ainsi que les tensions commerciales mondiales. Les prix ont oscillé entre des sommets de plus de 83 dollars le baril en janvier et des creux de 61 dollars en mai 2025. Platts a évalué le Brent daté à 67,86 dollars le baril le 8 août, une baisse significative par rapport aux plus de 80 dollars atteints brièvement en juin lors de l’escalade des tensions entre Israël et l’Iran. Le groupe cherche à capitaliser sur la demande saisonnière plus élevée de l’hémisphère Nord pour réintroduire des barils sur le marché sans provoquer de chocs de prix.
Accélération controversée du retour de production
Le 3 août, les huit pays appliquant des coupes volontaires ont convenu d’éliminer complètement leurs réductions de production en septembre, accélérant considérablement le calendrier initial. Cette décision fait suite à une augmentation de 411 000 b/j en mai, juin et juillet, soit trois fois le montant initialement prévu de 137 000 b/j par mois. Les EAU achèveront parallèlement l’introduction progressive d’une augmentation de quota de 300 000 b/j. Le plan initial prévoyait un retrait progressif sur 18 mois, maintenant réduit à seulement six mois.
Les plans de compensation soumis le 16 avril 2025 révèlent que sept membres de l’OPEP+ doivent compenser collectivement 4,57 millions de b/j de surproduction accumulée depuis janvier 2024. Les compensations les plus importantes sont prévues entre mai et octobre 2025, avec un engagement à terminer toutes les compensations d’ici juin 2026. Cette stratégie vise théoriquement à équilibrer l’augmentation de production autorisée, mais l’historique de non-conformité de certains membres, notamment l’Irak, le Kazakhstan et la Russie, soulève des questions sur l’efficacité réelle de ces mesures.
Défis structurels et perspectives de marché
La demande pétrolière chinoise, moteur traditionnel de la croissance mondiale, montre des signes de faiblesse préoccupants avec une baisse de 1,7% en juillet 2025 et des importations de brut en recul de 3% sur les huit premiers mois de l’année. Cette tendance, combinée à l’adoption massive de véhicules électriques en Chine où plus de 50% des ventes automobiles sont désormais électriques, remet en question les projections de demande à long terme. Les analystes prévoient un excédent d’offre jusqu’à fin 2025, ce qui pourrait exercer une pression significative sur les prix et potentiellement pousser le groupe à mettre en œuvre de nouvelles réductions.
Le groupe peut modifier ses plans à tout moment et se réunira prochainement le 7 septembre pour discuter des conditions du marché, de la conformité et de la compensation. La réunion du Comité ministériel conjoint de surveillance est prévue le 2 octobre, suivie d’une réunion ministérielle complète le 1er décembre à Vienne. Ces échéances offriront des opportunités d’ajustement face à un marché caractérisé par une demande incertaine, des niveaux de production élevés hors OPEP+ et des défis persistants de conformité interne qui continuent de miner l’efficacité des efforts de gestion du marché du groupe.