La Fédération de Russie travaille à la conception de turbines à gaz dépassant la barre des 300 MW, un segment jusqu’ici absent de sa production nationale. Cette annonce émane du ministère de l’Industrie et du Commerce, qui précise que les développements concerneront plusieurs gammes, allant des unités de 6 à 8 MW jusqu’aux modèles supérieurs à 300 MW. Le programme inclut également la conversion d’une turbine de 7 MW vers une configuration marine et la mise au point d’unités mobiles de 25 MW.
Un projet dans un contexte de montée en puissance domestique
Jusqu’à présent, la turbine domestique la plus puissante mise en service en Russie est la GTD-110M, installée à la centrale thermique d’Udarnaya. Ce modèle, d’une capacité nominale de 560 MW, a été inauguré en 2024 après une période de tests de charge maximale de 72 heures. Il a permis d’augmenter la capacité de la centrale de 454 MW à 560 MW, marquant une étape majeure dans la substitution des équipements importés.
Les turbines à gaz de forte puissance utilisées en Russie provenaient historiquement de constructeurs étrangers tels que Siemens, General Electric ou Alstom. Selon des études sectorielles, plus de 60 % des turbines supérieures à 170 MW en service dans le pays sont issues de l’importation. La mise au point d’un modèle domestique supérieur à 300 MW vise donc à réduire cette dépendance technologique.
Comparatif avec les modèles internationaux les plus puissants
Sur le marché mondial, les records de puissance en cycle simple sont actuellement détenus par la M701JAC de Mitsubishi Power (≈ 574 MW, rendement en cycle combiné : 64 %), suivie de près par la GE Vernova 9HA.02 (571 MW, 64 %) et la Siemens Energy SGT5-9000HL (545 MW, 63 %). L’italo-chinois Ansaldo/Shanghai Electric GT36 atteint 538 MW pour un rendement proche de 63 %.
En cycle combiné, ces modèles dépassent les 850 MW installés, avec des rendements situés au-delà de 63 %. La GTD-110M russe, avec ses 560 MW, se situe dans la même plage de puissance que les leaders mondiaux en cycle simple, mais reste en retrait sur le plan des rendements maximums atteints par les classes H et J.
Perspectives industrielles et enjeux pour le secteur
Le développement d’une turbine domestique supérieure à 300 MW implique la création d’installations de test spécialisées, en particulier pour les équipements électriques haute tension et les disjoncteurs isolés au gaz. Un centre de test dédié est en préparation afin de permettre la validation complète des équipements sur le territoire russe, une infrastructure rare à l’échelle mondiale.
Pour les industriels, la réussite de ce programme conditionnera la capacité du pays à concurrencer directement les constructeurs internationaux sur le segment stratégique des turbines à gaz de forte puissance. Les données actuelles laissent entrevoir un marché où l’offre domestique pourrait, à terme, couvrir la totalité des besoins internes et cibler certaines exportations régionales.