Eni cède au rouble et se protège d’une éventuelle coupure du gaz russe

Ce mardi 17 mai, la société italienne a entamé deux processus d'ouverture de comptes courants auprès de Gazprombank. L’un sera en roubles, l’autre en euro.

Pour la société italienne, prudence est mère de sûreté. Ce 17 mai, Eni a déclaré que deux comptes courants seraient ouverts en son nom auprès de Gazprombank d’après S&P Global Commodity Insights. Cette décision a été prise suite au récent décret du Kremlin rendant obligatoire les paiements de gaz dans la devise locale.

Une sécurité pour le géant italien des hydrocarbures

Ce processus d’ouverture de deux comptes courants auprès de la banque russe aurait été fait à titre de « précaution », selon Eni. Un compte en euros et un second en roubles ont été ouverts. Ceci se fait à l’approche des échéances de paiement du gaz russe, a déclaré la société le 17 mai.

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En effet, le producteur et exportateur de gaz russe a pris cette décision “unilatéralement” selon un communiqué. Bien que la société transalpine prévoie de continuer à payer ses commandes en euros, l’hypothèse d’une pression russe fait réagir. Dans un communiqué, elle déclare :

« Bien qu’Eni ait rejeté ces amendements, la société va ouvrir temporairement les deux comptes sans préjudice de ses droits contractuels, qui prévoient toujours un paiement en euros. […] Cette conditionnalité explicite sera incluse dans la procédure de paiement. »

Eni – Gazprom : Une pression qui s’agrandit en Italie

Face à un paiement qui devrait arriver dans les prochains jours, l’entreprise ne compte pas non plus faire faux bond à ses obligations. Elle précise notamment que sa décision avait été partagée avec les institutions italiennes. Cette dernière serait également en accord avec les actuelles sanctions internationales.

En effet, le gouvernement italien se doit de trouver une parade pour éviter un éventuel embargo russe qui lui serait fatal. Sous fond de guerre en Ukraine, le pouvoir cherche à déstabiliser et à retrouver une position de force. L’interruption récente des exportations de gaz vers la Pologne et la Bulgarie par Gazprom en est le parfait exemple.

En Italie, le pays est particulièrement inquiet de l’humeur russe. En effet, le gaz naturel venu de Russie représente 16% des besoins énergétiques du pays. La nation transalpine cherche de nouveaux moyens pour réduire cette dépendance conséquente.

Quelques signes rassurants persistent

Pour réduire cette dépendance, l’Italie a cherché à se rapprocher d’autres pays producteurs d’hydrocarbures. Fin février, Luigi Di Maio, ministre des Affaires étrangères italien, et Claudio Descalzi, PDG d’Eni, se rendent en Algérie. Dans les jours qui suivirent, les deux hommes se sont également rendus au Qatar, au Congo et en Angola.

Selon Eni, la société gazière russe a confirmé que les paiements pourraient vraisemblablement se poursuivre en euros. Selon S&P Global Commodity Insights, un tiers opérant à la Bourse de Moscou effectuera la conversion des euros aux roubles. Cette dernière se ferait en moins de 48 heures et sans intervention de la Banque centrale de Russie.

D’éventuels retards ou problèmes de conversion ne causeraient aucune incidence sur les approvisionnements. Par ailleurs, la Russie et Gazprom avaient récemment affirmé qu’ils étaient des producteurs d’énergie fiable. Suite à l’interruption de livraison du gaz russe dans certains pays, Reuters affirmait :

« Gazprom n’a pas immédiatement répondu à la demande de commentaire sur la fiabilité de l’approvisionnement. »

Une évolution du marché encore menaçante

Selon S&P Global Commodity Insights, le prix mensuel à terme du TTF a atteint un record de 212,15 euros/MWh le 8 mars. Même si le prix a actuellement baissé, il reste élevé en comparaison avec l’année dernière. L’augmentation serait même de 250% au 16 mai dernier avec un prix du TTF à 92,55 euros/MWh.

De la même manière, le respect des sanctions évoqué ne semble pas être le même pour tout le monde. Si Eni affirme que cette méthode “ne se heurterait pour l’instant à aucune réglementation européenne.” Le porte-parole en chef de la Commission Européenne, Eric Mamer, a communiqué ceci le 17 mai :

« Soyons clairs : tout ce qui va au-delà de l’ouverture d’un compte dans la devise du contrat avec Gazprombank et du versement sur ce compte, puis de la publication d’une déclaration indiquant qu’avec cela, vous considérez avoir finalisé le paiement, contrevient aux sanctions. C’est clair, les entreprises doivent payer les livraisons dans la monnaie prévue par le contrat. »

Une scission trop complexe entre gaz russe et Europe ?

Conscient que l’Europe dépend en partie du gaz russe, Eric Mamer a déclaré :

« Nous continuons à acheter du gaz à la Russie, et les entreprises qui achètent du gaz doivent évidemment effectuer des paiements, et nous définissons le cadre dans lequel elles peuvent effectuer ces paiements. »

L’hypothèse d’un embargo européen des hydrocarbures russes a été mise à mal par le véto de la Hongrie. Les 27 pays membres de l’Union Européenne dialoguent régulièrement pour savoir vers quelle direction se diriger.

Cette dépendance, le président russe Vladimir Poutine en a bien conscience. Il affirme d’ailleurs que tous les acteurs de l’UE ne pourraient se passer des hydrocarbures russes. Ce mardi 17 mai, le chef d’État russe expliquait :

« Évidemment, certains États européens dont le mix énergétique dépend fortement des hydrocarbures russes ne pourront pas s’en passer longtemps. Ils ne pourront pas se débarrasser de notre pétrole. »

 

 

Russie: crise économique chez Gazprom face aux sanctions et au sabotage

En 2023, Gazprom a enregistré une perte record de 6,4 milliards d’euros, marquée par des sanctions internationales et le sabotage de ses pipelines. Ces défis mettent en lumière les vulnérabilités de Gazprom et les tensions géopolitiques qui perturbent le secteur énergétique russe. Face à ces crises, l’entreprise oriente désormais ses efforts vers les marchés asiatiques, espérant y trouver stabilité et nouvelles opportunités.

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