Le Japon a franchi une étape significative dans le développement de son secteur éolien flottant avec l’achèvement de l’installation de huit turbines près des îles Goto, dans le sud-ouest de l’archipel. Le projet, qui devrait entrer en exploitation commerciale en janvier, est le premier du pays à atteindre cette échelle. Il s’appuie sur des structures flottantes mieux adaptées à la topographie sous-marine locale, marquée par des fonds marins profonds à proximité immédiate des côtes.
Un pari sur une technologie adaptée au contexte géologique
La profondeur atteint 140 mètres à seulement cinq kilomètres du rivage, ce qui rend l’ancrage au fond marin inadapté dans de nombreuses zones. Les éoliennes flottantes sont également considérées comme plus résistantes face aux séismes et typhons fréquents dans la région. Ces caractéristiques techniques ont conduit le gouvernement japonais à désigner l’éolien offshore comme un pilier de sa stratégie énergétique à horizon 2040, avec un objectif de 4 à 8% de la production électrique nationale issue de cette source, contre environ 1% actuellement.
Le pays reste néanmoins dépendant à 65% des centrales thermiques alimentées par charbon et hydrocarbures. En 2024, la part des énergies renouvelables s’établissait à 26,7% selon les dernières données disponibles. Pour combler cet écart, le gouvernement a fixé un objectif de 45 GW de capacité éolienne offshore flottante d’ici 2040.
Des désengagements industriels et des ajustements réglementaires
Malgré ces ambitions, les coûts élevés de développement ont déjà provoqué des abandons notables. Mitsubishi Corporation a annoncé en août son retrait de trois projets offshore, invoquant la hausse des prix mondiaux. D’autres acteurs du secteur ont exprimé la nécessité d’un soutien renforcé de la part de l’État, notamment à travers une révision du système d’appel d’offres jugé inadapté à la conjoncture inflationniste actuelle.
Plusieurs experts appellent à une rationalisation des procédures réglementaires et à l’introduction de mécanismes d’ajustement pour réduire les incertitudes économiques. L’amélioration des conditions d’investissement est jugée essentielle pour accélérer les déploiements.
Une industrie locale encore peu structurée
Le Japon ne dispose pas encore d’une base industrielle suffisamment développée pour soutenir la cadence d’installation nécessaire, estimée à 3 GW par an, soit environ 200 turbines de 15 MW. Le manque de fabricants nationaux de turbines et de sites de production freine les perspectives de montée en échelle. Le développement d’une chaîne d’approvisionnement domestique est perçu comme un enjeu de souveraineté énergétique.
Des défaillances techniques ont également été relevées sur le projet de Goto, retardé de deux ans en raison de problèmes de structure sur certaines éoliennes. La maintenance de ces installations reste un défi majeur, en particulier dans un environnement maritime complexe.
Relations complexes avec le secteur de la pêche
Le projet a suscité des tensions avec certaines communautés de pêcheurs, qui estiment avoir été peu consultées lors du lancement. Toutefois, des mesures de partage de revenus ont été mises en place, incluant la redistribution d’une partie des recettes issues de la production électrique et des taxes foncières. Certains pêcheurs ont été directement impliqués dans la surveillance des chantiers.
La fédération nationale des coopératives de pêche a exprimé son inquiétude après le retrait de Mitsubishi, soulignant les attentes économiques générées au sein des communautés côtières. Des espoirs se dessinent autour de nouvelles opportunités d’emploi, notamment dans la maintenance des infrastructures maritimes.