Yannick Jadot dévoile son programme pour l’élection présidentielle début janvier 2022. Il privilégie les énergies renouvelables et prône une sortie progressive du nucléaire. Ses ambitions entrent en confrontation avec la crise géopolitique ukrainienne.
Yannick Jadot, du militantisme à la candidature à l’Élysée.
Yannick Jadot, eurodéputé et militant écologiste présente sa candidature à l’élection présidentielle de 2022, soutenu par Europe Écologie-Les Verts (EELV). Dès le 29 janvier 2022, le député européen dévoile les principales lignes de son programme présidentiel depuis la ville de Lyon. En effet, deux représentants d’EELV administrent cette commune depuis la victoire des écologistes aux élections municipales de 2020.
Le projet du candidat à l’Élysée s’ouvre sur les bouleversements climatiques qu’il considère comme le plus grand défi actuel. Pour appuyer son programme, il s’empare de l’ambition de l’Union européenne de réduction des émissions de gaz à effet de serre. Bruxelles souhaite réduire de 55% les gaz à effet de serre à horizon 2030 par rapport au niveau de 1990.
Un programme en adéquation avec les ambitions européennes.
Dans son programme, Yannick Jadot affiche l’ambition d’une électricité 100% renouvelable. Dans cette perspective, il souhaite déployer 3.000 éoliennes terrestres supplémentaires avant l’année présidentielle de 2027. À cette même échéance, il envisage la construction de 340 Km2 de panneaux photovoltaïques, installés sur les toitures.
Il reprend le principe du gouvernement actuel, qui souhaite passer de 12 à 18 GW d’énergie solaire d’ici l’année 2023. Cet objectif s’appuie sur le loi « climat et résilience » promulguée le 22 août 2021, renforçant l’obligation d’installation de panneaux photovoltaïques. Le 3 novembre 2021, la ministre de la transition écologique réaffirmait vouloir mobiliser les surfaces pouvant accueillir des panneaux solaires.
Vers la fin des mobilités thermiques.
Le candidat à la présidentielle prévoit la conversion d’un million de moteurs thermiques en électrique avec le système de retrofit. Il soutient également l’implantation de bornes de recharges et compte diviser par 4 l’impact carbone des véhicules particuliers et utilitaires. Par ailleurs, il entend également produire 32 TWh de biogaz à horizon 2030.
Au niveau de la mobilité, Yannick Jadot ambitionne également de s’appuyer, et de développer, le maillage ferroviaire du territoire. Chaque année, il prévoit d’investir €4 milliards en faveur de la modernisation et la rénovation des infrastructures ferroviaires. Outre le développement de petites lignes, il souhaite doubler la part du fret dans le transport de marchandises d’ici 2027.
Électorat des villes et électorat des champs.
Yannick Jadot oscille entre 5% et 9% des intentions de vote pour le premier tour de la présidentielle de 2022. Les Verts, généralement, font de faibles scores à la présidentielle et aux législatives, qui sont liés depuis l’instauration du quinquennat. À l’inverse, ils obtiennent de meilleurs scores aux élections municipales, régionales et européennes.
Le candidat des Verts pourra compter sur son électorat fidèle des grandes villes mais peine à convaincre en milieu rural. Au niveau régional, la façade méditerranéenne, à l’exception de la Corse, leur est peu favorable, comme une partie des Hauts-de-France. Le profil des électeurs d’EELV est plutôt jeune, citadin et se dessine, globalement, autour d’un niveau de capital culturel élevé.
Le concept de décroissance énergétique.
Une fraction de l’électorat d’EELV adhère à la décroissance, estimant possible de produire autant, tout en réduisant les besoins énergétiques. Dans la perspective des décroissants, la réduction des besoins énergétiques permet de fermer des centrales nucléaires au profit d’autres énergies. Yannick Jadot appuie cette solution en agitant le spectre d’une catastrophe nucléaire de grande ampleur comme Tchernobyl ou Fukushima.
La décroissance énergétique est un objectif difficilement réalisable en raison de l’augmentation des besoins énergétiques, notamment pour produire l’électricité. En effet, les besoins en électricité ne cessant de croître, il semble impossible de n’utiliser qu’exclusivement des énergies renouvelables intermittentes. L’objectif de la transition énergétique est de sortir du gaz et du charbon, tout en préservant la sécurité énergétique.
Des ambitions à l’épreuve des réalités.
Yannick Jadot est conscient que la France est dans un moment décisif au regard de la question du nucléaire civil. Le candidat d’EELV prône une sortie responsable de l’atome et souhaite fermer progressivement les réacteurs en fonction de leur obsolescence. Ainsi, dans son programme, il prévoit la fermeture d’une dizaine d’entre eux d’ici 2035.
L’énergie nucléaire, comme mode de production d’électricité, émet, en moyenne, peu de dioxyde de carbone par kilowattheure (CO2/KWh). Selon le rapport du GIEC de 2014, l’énergie nucléaire émet 12 grammes de CO2/KWh. De leur côté, les centrales à gaz et à charbon relâchent, respectivement, 490 et 820 grammes de CO2/KWh.
Le contre-exemple allemand, modèle d’EELV.
L’Allemagne, qui souhaite se passer de l’énergie nucléaire, tend à remplacer ses réacteurs par des centrales gazières et charbonnières. En effet, si Berlin promeut le développement des énergies renouvelables comme l’éolien et les panneaux photovoltaïques, ces énergies demeurent intermittentes. L’Allemagne doit alors se tourner vers l’exploitation du charbon et du gaz, provoquant, ainsi, l’élévation de l’intensité carbone du pays.
Cette situation énergétique engendre de lourdes conséquences pour l’Allemagne qui sacrifie, en partie, son économie et son autonomie. En choisissant de sortir du nucléaire, la première puissance économique de l’Union européenne subit le prix élevé de l’électricité. Parallèlement, au niveau stratégique, le pays se place dans une situation de dépendance aux flux gaziers provenant de Russie.
La guerre en Ukraine.
Dans la nuit du 24 au 25 février 2022, la Russie lance une offensive militaire contre l’Ukraine. Yannick Jadot réagit en condamnant l’invasion et appelle à aider Kiev face à Vladimir Poutine qu’il qualifie de dictateur. Il demande, lors d’une session au parlement européen de soutenir militairement le peuple ukrainien en fournissant de l’armement.
Le candidat d’EELV souhaite la mise en place d’une politique de défense européenne pour faire face aux crises géopolitiques. Parallèlement, il se déclare favorable au durcissement des sanctions européennes à l’égard de la Russie de Vladimir Poutine. Il appelle l’Europe à investir pour sa souveraineté énergétique, en référence aux gazoducs reliant la Russie au reste du continent.
Une Europe dépendante au gaz russe.
L’Europe est, globalement, dépendante aux flux gaziers en provenance de la Russie. L’Union européenne importe environ 40% de son gaz depuis la Fédération de Russie. Toutefois, il existe de fortes disparités entre les différents pays de l’Union européenne.
En Allemagne, le gaz russe représente 66% de la consommation de gaz du pays, en France il représente 17%. Outre-Rhin, les importations de gaz russe représentent ainsi un tiers des importations totales de l’Union européenne. Cette guerre justifie, à postériori, la taxonomie verte incluant le gaz et le nucléaire adoptée par Bruxelles, décriée par Yannick Jadot.
Une taxonomie verte salutaire.
L’Union européenne intègre, après d’âpres discussions, début 2022, le gaz et l’énergie nucléaire dans sa taxonomie verte. La France soutenait l’incorporation de l’énergie nucléaire dans la taxonomie alors que l’Allemagne s’opposait à cette proposition. En revanche, Berlin soutenait l’intégration du gaz dans cette réglementation européenne.
Yannick Jadot s’oppose à l’intégration du nucléaire, invoquant les risques et au gaz en raison de son caractère fossile. Cependant, Berlin, en réaction à la guerre en Ukraine décide de prolonger l’exploitation de ses 3 dernières centrales nucléaires. Il est nécessaire de raisonner en terme de bouquet énergétique, le nucléaire demeure ainsi indispensable à la sécurité énergétique.