Eurodéputés et Etats membres de l’UE se sont mis d’accord mercredi pour réduire les émissions polluantes du transport aérien en imposant un taux minimum de carburants « verts » pour les avions au départ du continent.
Le texte, volet de l’ambitieux plan climat européen, prévoit que les carburants disponibles dans les aéroports de l’UE compteront en 2025 dans leur composition au moins 2% de « carburants aériens durables » (SAF), puis 6% en 2030, avec une augmentation progressive jusqu’à 70% d’ici 2050. Les « carburants durables » incluent les carburants de synthèse (fabriqués à partir d’hydrogène et de CO2), l’hydrogène renouvelable, les carburéacteurs à base de gaz résiduaires et déchets plastiques, ou encore les biocarburants issus de résidus agricoles, d’algues, de biomasse, ou d’huile de cuisson usagée.
L’objectif 2050 est en-deçà de ce que réclamaient les eurodéputés (85%), mais dépasse la proposition initiale de la Commission européenne (63%) qu’avaient repris les Etats membres. Cette loi, à elle seule, doit permettre de réduire d’environ deux-tiers les émissions de CO2 du transport aérien européen d’ici 2050 par rapport au scénario où aucune mesure ne serait prise, estime la Commission. L’aviation représente environ 4% des émissions européennes de gaz à effet de serre.
« Sécurité des approvisionnements »
« L’accord apporte une certitude immédiate aux compagnies et producteurs de +carburants durables+ », et évite la « fragmentation » du marché européen, salue la fédération Airlines for Europe (A4E), selon qui les Etats doivent renforcer la production des SAF et « la sécurité des approvisionnements ». L’accord prévoit une part minimale de 1,2% de carburants de synthèse dans le kérosène fourni par les aéroports européens en 2030-2031, très au-delà de ce que proposaient la Commission et les Etats (0,7%). Cette part atteindra 2% en 2032-2034, puis 5% en 2035, avant d’atteindre 35% en 2050.
Les carburants de synthèse sont les seuls « dont l’usage peut être augmenté de manière durable », estime Matteo Mirolo, de l’ONG Transport&Environment (T&E). L’accord devrait doper leur production, « apportant aux compagnies la certitude que cet +e-kérosène+ deviendra moins cher et largement disponible ». Les « carburants synthétiques bas-carbone » sont inclus, c’est-à-dire fabriqués avec de l’électricité issue non seulement d’énergies renouvelables mais également du nucléaire (donc décarboné), disposition soutenue notamment par la France dans nombre de textes climatiques européens.
Le texte prévoit aussi que l’essentiel de l’approvisionnement en kérosène pour les vols au départ de l’UE se fasse dans les aéroports européens, afin de limiter les émissions dues à une cargaison excessive de carburant et éviter que les compagnies contournent les règles en s’alimentant hors-UE. L’accord exclut les biocarburants issus de cultures vivrières ou de sous-produits d’huile de palme, mais pas ceux provenant d’huiles de cuisson, « dont l’approvisionnement est pourtant limité en Europe, au risque de créer des pénuries dans d’autres industries » qui pourraient choisir des alternatives moins vertes, s’inquiète T&E.
Enfin, l’accord ouvre la porte à une future prise en compte des émissions autres que le CO2 (soufre…), qui représentent les deux-tiers de l’impact climatique de l’aviation.
Un autre texte du plan climat européen, définitivement adopté mardi, fera payer aux compagnies les émissions CO2 de leurs vols intra-européens, avec la disparition progressive des quotas gratuits dont elles bénéficiaient jusqu’ici, mais avec un mécanisme incitatif en cas d’utilisation de carburants durables.