La réduction des émissions de carbone n’est plus une option pour les entreprises énergétiques, à l’image de Chevron et Shell contraintes. L’une respectivement par ses actionnaires, l’autre par les tribunaux qui la somme de respecter ses engagements.
Réduction des émissions carbone : Chevron renforce ses objectifs
Les actionnaires de Chevron ont voté à 61% une proposition visant à réduire les émissions dites de Scope 3 de l’entreprise. C’est-à-dire les émissions qui ne sont pas directement liées au processus de fabrication. Mais la proposition pointe plus précisément les émissions générées par l’utilisation de ses produits.
Pression grandissante des investisseurs
Cette décision souligne la pression croissante des investisseurs sur les sociétés pétrolières et gazières pour réduire leur empreinte carbone. Même si certaines d’entre elles affirmaient jusqu’ici ne pas avoir le contrôle sur la manière dont leurs produits étaient utilisés. Leur rôle est à présent de trouver de nouveaux moyens d’atteindre les engagements climatiques pris au niveau mondial.
Le cas échéant, les risques encourus par les sociétés énergétiques prennent de nouvelles formes. ExxonMobil par exemple, le plus proche rival de Chevron, vient de perdre au moins deux sièges au conseil d’administration au profit d’un fonds spéculatif activiste. Le but étant de forcer les dirigeants de la société à prendre en compte le risque de ne pas adapter leur stratégie aux efforts climatiques mondiaux.
Une proposition insuffisante
Toutefois, cette proposition reste lacunaire. Elle ne fixe en effet aucun objectif chiffré de réduction des émissions, ni de date limite pour l’atteindre. Chevron n’a donc toujours pas d’objectifs à long terme pour atteindre la neutralité carbone.
Par ailleurs, Chevron s’est opposé à plusieurs autres propositions, qui avaient pourtant suscité un soutien plus important encore que pour celle adoptée. L’une d’elle invitait l’entreprise pétrolière à préparer un rapport sur l’impact de son activité dans le cadre de l’objectif de neutralité carbone d’ici 2050. Enfin, une autre demandait à l’entreprise de fournir plus d’informations sur ses activités de lobbying.
Shell condamnée par un tribunal aux Pays-Bas
L’entreprise se voit également contrainte d’intensifier la réduction de ses émissions prévues à la suite du jugement rendu mercredi 26 mai 2021 par un tribunal néerlandais. La compagnie anglo-néerlandaise avait en effet été poursuivie en justice en 2019 par sept groupes dont Greenpeace et les Amis de la Terre. Selon eux, l’entreprise menace les droits de l’homme en continuant à investir massivement dans la production de combustibles fossiles.
« Réduire ses émissions de CO2 de 45% d’ici 2030 »
« Le tribunal ordonne à Royal Dutch Shell, par le biais de sa politique d’entreprise, de réduire ses émissions de CO2 de 45% d’ici 2030 par rapport au niveau de 2019 pour le groupe Shell et les fournisseurs et clients du groupe », a déclaré la juge Alwin, responsable de l’affaire.
Le premier négociant de pétrole et de gaz au monde avait pourtant défini l’une des stratégies climatiques les plus ambitieuses du secteur en début d’année. Toutefois, le tribunal a déclaré qu’elle n’était pas concrète et que Shell risquait donc de violer ses obligations de réduction. L’entreprise a annoncé vouloir faire appel à la suite de ce verdict.
Une décision historique
Pour certains, cette décision est historique puisque « c’est la première fois qu’un tribunal décide qu’un grand pollueur doit réduire ses émissions ». Cela pourrait également entrainer d’autres actions en justice contre des sociétés énergétiques du monde entier.
« Il s’agit sans doute du jugement le plus important rendu à ce jour en matière de changement climatique, qui souligne que les entreprises, et pas seulement les gouvernements, peuvent être la cible de litiges stratégiques visant à susciter des changements de comportement », a déclaré Tom Cummins, avocat du cabinet Ashurst.
La « chasse » aux gros pollueurs s’intensifie donc parmi les défenseurs de la cause climatique et prend de nouvelles formes. Les entreprises énergétiques subissent en effet la pression croissante des investisseurs, des militants et des gouvernements pour abandonner les combustibles fossiles au profit des énergies renouvelables.