Les revenus pétroliers du Soudan du Sud continuent de disparaître dans des circuits opaques, privant la population d’infrastructures essentielles. Un nouveau rapport de la Commission des droits de l’homme des Nations unies indique que plus de $2.2bn ont été détournés du programme « Oil for Roads » entre 2021 et 2024, initialement destiné au développement routier.
Près de 90% des routes promises jamais construites
Le document précise que seuls $500mn ont permis la construction d’infrastructures fonctionnelles, alors que près de $1.7bn ont été transférés à des sociétés écrans sans livraisons concrètes. Plusieurs de ces entités seraient liées au vice-président Benjamin Bol Mel. Près de 90% des routes prévues dans le cadre du programme n’ont pas été réalisées, compromettant l’accès aux régions rurales et ralentissant la circulation des produits agricoles.
Le manque de routes accroît les coûts de transport et limite la disponibilité de nourriture, exacerbant une inflation déjà hors de contrôle. La Banque mondiale indique que les prix ont bondi de 105% en 2024. Le Fonds monétaire international (FMI) prévoit une inflation de 65.7% pour 2025.
Une économie sous dépendance du pétrole
Le pétrole représente environ 90% des recettes publiques du Soudan du Sud. Pourtant, selon la Banque mondiale, cette manne ne finance que très peu les investissements productifs en raison d’une corruption systémique et d’une gestion budgétaire inefficace. L’économie du pays s’est contractée de manière spectaculaire : son produit intérieur brut (PIB), estimé à $12bn en 2015, est tombé à environ $5.4bn en 2024.
Cette dépendance quasi exclusive aux revenus pétroliers rend les finances publiques vulnérables, entravant toute diversification économique. L’absence d’investissements dans les secteurs non pétroliers limite fortement les perspectives de croissance.
Un seuil critique de pauvreté
Dans ce contexte, les prévisions de la Banque mondiale sont alarmantes : le taux de pauvreté monétaire pourrait atteindre 92% en 2025. Déjà en 2022, l’institution estimait que 76% de la population vivait sous le seuil national de pauvreté. La progression rapide de la précarité s’ajoute à l’instabilité politique chronique du pays, aggravant les risques sociaux à court terme.
« Le manque de redevabilité dans la gestion des ressources naturelles compromet gravement les droits fondamentaux des citoyens », affirme le rapport des Nations unies. Le détournement à grande échelle des revenus pétroliers empêche l’État de répondre aux besoins de base de sa population, alors que les infrastructures demeurent en ruine.