Le pétrole iranien pourrait ré-abonder le marché si les États-Unis lèvent les sanctions. Cette possibilité est actuellement en discussion à Vienne. L’Iran pourrait ainsi revenir dans le JCPOA et l’OPEP remettre des restrictions de production à l’Iran.
Le pétrole iranien résiste malgré l’absence de levée des sanctions
En dépit de l’absence de levée des sanctions, l’Iran connaît depuis plusieurs mois une très forte hausse de sa production de pétrole. Rappelons qu’avant l’imposition des sanctions par l’administration Trump, Téhéran pouvait se targuer de produire 4 millions de barils par jour. À la suite de cette politique américaine de « pression maximale », le pays a vu sa production fortement décliner.
En juillet 2020, la production a atteint son plus bas historique à 1,8 million de barils/jour. Depuis, le secteur pétrolier iranien connaît un véritable rebond avec 2,4 millions de barils produits par jour. Ce chiffre équivaut à la production iranienne d’avril 2019 peu après la fin des exemptions accordées par l’administration Trump.
Un contournement des sanctions américaines
En d’autres termes, l’Iran a réussi à maintenir un niveau de production élevé, et ce, malgré les sanctions américaines. À cela s’ajoute l’augmentation depuis plusieurs mois des exportations de pétrole iranien atteignant leur plus haut niveau depuis avril 2019. D’après certains experts, on recenserait un niveau d’exportations proche de 600.000 barils/jour au mois de mars dernier.
Cette performance s’explique par le contournement croissant des sanctions américaines par les compagnies iraniennes et leurs partenaires principalement chinois. Ainsi, les Iraniens utilisent des transferts de cargaison en pleine mer entre tankers afin d’éviter les détections. De même, ils n’hésitent pas à mélanger leur cargaison avec du pétrole irakien rendant très difficile la surveillance des exportations.
Une levée probable des sanctions à la fin mai
Le récent rebond de la production iranienne s’inscrit dans le cadre des négociations en cours pour le retour du JCPOA. La question pétrolière se trouve en effet au cœur des discussions à Vienne entre partenaires et Iraniens. Pour Téhéran, les États-Unis doivent d’abord mettre en œuvre une levée des sanctions avant de revenir dans l’accord. À l’inverse, Washington exige que l’Iran revienne en premier dans l’accord avant d’envisager un allègement des sanctions.
Ce jeu à somme nulle semble prendre fin avec des avancées récentes permettant un accord intérimaire avant les élections iraniennes. D’après certaines sources, Washington aurait accepté de revenir en premier dans l’accord en retirant certaines sanctions. Les Iraniens auraient quant à eux décidé d’abandonner leurs exigences de retrait de l’ensemble des sanctions.
Une levée graduelle des restrictions
Cet accord de principe reposerait sur une levée graduelle des restrictions touchant le secteur pétrolier iranien. Ainsi, l’administration Biden accorderait une exemption (waiver) aux exportations de brut iranien à partir du 1er juin. Cette exemption serait maintenue jusqu’en septembre afin de s’assurer du respect des conditions de l’accord par Téhéran.
Washington craint en effet l’arrivée au pouvoir d’un président ultra-conservateur lors des élections de juin menaçant la viabilité de l’accord. Les exemptions temporaires serviraient ici d’outils de flexibilité et de pression pour l’administration Biden en cas de victoire des conservateurs. L’accord prévoit cependant un abandon définitif des sanctions contre le secteur pétrolier iranien dès la fin du mois de septembre.
Quels impacts sur les marchés pétroliers ?
L’accord intérimaire qui semble se dessiner d’ici à la fin du mois de mai pourrait donc permettre une levée des sanctions. Pour l’Iran, cela stimulerait de manière incontestable sa production et ses exportations de brut dans les prochains mois. Cette perspective est d’autant plus encourageante qu’un certain nombre de pays comme la Chine ont déjà signé des contrats d’importations. Rappelons que Pékin et Téhéran viennent de signer un accord de 400 milliards d’investissement sur les 25 prochaines années.
Néanmoins, les exportations iraniennes ne devraient reprendre complètement qu’à partir de septembre, une fois les sanctions définitivement abandonnées. D’après l’agence Platts, la production iranienne ne devrait augmenter que de 500.000 barils/jour entre juin et septembre. En revanche, elle devrait atteindre son niveau d’avant les sanctions, soit 4 millions barils/jour, dès le 1er semestre 2022.
Une production qui dépendra des politiques de l’OPEP
Ce scénario de production risque pourtant de se voir entravé en fonction des quotas de production décidés par l’OPEP. Pour l’heure, Téhéran bénéficie d’une exemption au sein de l’organisation au même titre que le Venezuela et la Libye. Cela signifie que l’Iran n’est pas tenu par la répartition des quotas alloués au sein de l’OPEP+.
Néanmoins, cette situation pourrait changer si le pays parvenait à un accord levant les restrictions sur son secteur pétrolier. Pour l’OPEP, une très forte hausse de la production iranienne pourrait effectivement entraîner des tensions concernant les quotas. D’un côté, cela représenterait une perte de parts de marché pour les pays tenus par l’accord de l’OPEP +. D’un autre côté, cela pourrait réduire la production des autres membres de l’OPEP en cas d’augmentation de la demande.
En effet, pour répondre à la demande attendue au second semestre, l’OPEP devra augmenter ses quotas de production. Or, si l’Iran revient à son niveau d’avant les sanctions, cela limitera de facto les quotas alloués aux autres pays. C’est pourquoi l’OPEP regarde avec attention les négociations en cours à Vienne. En cas d’accord entre Washington et Téhéran, cela pourrait avoir des conséquences importantes sur les marchés pétroliers.