L’Oxford Institute for Energy Studies (OIES) a publié une modélisation détaillée des perspectives de demande mondiale de gaz naturel à un prix moyen de 6 dollars par million British thermal units (million de British thermal units) (MMBtu). L’étude évalue les effets d’un tel niveau de prix sur la consommation mondiale de liquefied natural gas (gaz naturel liquéfié) (LNG) selon deux horizons : le court terme, correspondant à 2030, et le long terme, projeté à 2035. Le rapport décompose les réactions de demande par région et par secteur, en isolant les zones les plus sensibles au signal prix.
Hausse globale concentrée sur l’Asie
L’OIES estime que la baisse du prix à 6 $/MMBtu pourrait accroître la demande mondiale de LNG de 26,5 à 94 milliards de m³ à court terme, soit un gain médian de 60,5 milliards de m³. À l’horizon 2035, cette augmentation atteindrait 62,5 à 177,5 milliards de m³, soit environ 120 milliards de m³ supplémentaires, équivalant à près de 10 % des importations mondiales de LNG projetées. L’essentiel de la hausse se concentrerait en Asie, notamment en Chine, en Inde et dans le bloc Japon–Corée–Taïwan, où les centrales électriques à gaz et l’industrie offrent la plus forte élasticité prix.
En Europe, la réponse serait marginale : une hausse de 5 à 9 milliards de m³ à court terme, portée par l’électricité, et de 10 à 16 milliards de m³ à long terme, liée à la ralentissement du déploiement éolien offshore. Le continent reste contraint par le système d’échange de quotas d’émission (EU ETS), dont le prix élevé du carbone limite les substitutions charbon–gaz.
Chine et Inde : moteurs principaux de la croissance
En Chine, la hausse de demande est estimée entre 16 et 70 milliards de m³ à court terme et jusqu’à 115 milliards de m³ à long terme, avec une moitié seulement couverte par les importations de LNG, le reste étant absorbé par la production domestique. Les secteurs industriels, bâtiments et transport représentent les principaux contributeurs. L’État chinois vise un taux d’autosuffisance gazière compris entre 50 et 60 %, ce qui limite la hausse des volumes importés.
En Inde, la réponse court terme se situe entre 4,6 et 11 milliards de m³ et atteint 17 à 35 milliards de m³ à long terme, tirée par la City Gas Distribution (distribution gazière urbaine) (CG D) et la substitution au fuel et au petcoke dans les zones industrielles. La montée en puissance dépend de la bancabilité des terminaux GNL et des investissements en infrastructures pipelines.
Asie émergente et autres régions
Au Japon, en Corée du Sud et à Taïwan, l’effet court terme oscille entre 3 et 14 milliards de m³, uniquement dans le secteur électrique. À plus long terme, la fourchette atteint 3 à 32 milliards de m³, liée à l’utilisation accrue des centrales à cycle combiné. En Asie émergente, les ajustements sont estimés à 6 à 16 milliards de m³ au court terme et jusqu’à 20 milliards de m³ à l’horizon 2035. La capacité à répondre dépend des réseaux électriques et de l’accès aux importations de LNG.
En Amérique latine, l’effet court terme est évalué à 9 milliards de m³, principalement dans l’industrie, et à 14–17 milliards de m³ à long terme via l’électricité et l’industrie. En Afrique, l’OIES ne prévoit aucune variation notable car la croissance de la demande repose déjà sur des moteurs indépendants du niveau de prix.
Taux d’utilisation et équilibre du marché LNG
Selon le scénario OIES, une utilisation moyenne des capacités de liquéfaction d’environ 92 % serait compatible avec un prix de 6 $/MMBtu en 2030, puis 95 % en 2035. Au-delà de 99 %, les prix se rapprocheraient du coût marginal de long terme, mettant fin au plancher observé. La stabilité autour de 900 milliards de m³ d’importations mondiales permet de maintenir cet équilibre entre offre et demande.
La projection globale fait ressortir une hausse de la consommation entre 2024 et 2035 : la Chine passerait de 426 à 548 milliards de m³, l’Inde de 75 à 115 milliards de m³ et l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN) de 157 à 217 milliards de m³. En Europe, la demande se maintient autour de 460 milliards de m³, avec un redéploiement vers la production électrique. L’Amérique latine progresse de 162 à 195 milliards de m³, soutenue par les centrales à gaz et les usages industriels.