Orano, acteur majeur de l’uranium mondial, a suspendu ses dépenses d’extraction au Niger. Cette mesure, annoncée à travers un communiqué, fait suite à une réunion du conseil d’administration de Somaïr (Société des Mines de l’Aïr) le 12 novembre 2024. Somaïr est une filiale détenue à 64,3 % par Orano et à 36,6 % par l’État nigérien.
La décision découle principalement des blocages persistants sur les exportations de matières premières. Depuis juin, la fermeture des frontières entre le Niger et le Bénin a paralysé l’acheminement de l’uranium. La Somaïr accumule un stock de 1 050 tonnes de concentré d’uranium, représentant près de 300 millions d’euros, selon Orano.
Conflit avec la junte nigérienne
Les tensions entre Orano et la junte militaire, au pouvoir depuis le coup d’État de juillet 2023, ont amplifié la crise. En octobre, Orano avait déjà suspendu sa production, évoquant les « difficultés financières croissantes » de Somaïr. Ces difficultés sont notamment attribuées au retrait par la junte d’un permis d’exploitation pour le gisement d’Imouraren, l’un des plus importants au monde.
La junte, de son côté, conteste la légitimité de cette suspension. Elle accuse Orano d’avoir agi unilatéralement sans concertation préalable. En réponse, les représentants de Sopamin (Société du Patrimoine des Mines du Niger) ont refusé de participer au vote lors de la réunion du conseil.
Une réorientation stratégique
Orano a déclaré vouloir rediriger sa trésorerie disponible vers le paiement des salaires et le maintien des fonctions vitales du site industriel. Ce choix vise à préserver l’activité à minima en attendant une résolution des tensions.
Dans ce climat, le Niger explore d’autres partenariats. Le ministre des Mines, Ousmane Abarchi, a récemment affirmé avoir initié des discussions avec des entreprises russes et iraniennes lors du sommet Russie-Afrique à Sotchi. Ce changement stratégique marque une volonté de diversifier les collaborations internationales pour mieux contrôler l’exploitation des ressources locales.
Un enjeu stratégique pour la France
Le capital d’Orano est détenu à 90 % par l’État français, faisant de l’entreprise un acteur clé pour la souveraineté énergétique de la France. La situation au Niger pose un défi géopolitique majeur pour Paris, compte tenu de l’importance stratégique de l’uranium nigérien pour le secteur nucléaire.
La junte nigérienne, désireuse de revoir les contrats avec les entreprises étrangères, pourrait bouleverser les équilibres en favorisant de nouveaux partenariats. Cette réorientation, ajoutée aux restrictions d’exportation, laisse planer des incertitudes sur l’avenir de l’exploitation minière dans la région.