Le groupe français Orano, spécialiste mondial de l’uranium, poursuit son différend avec l’État du Niger. L’entreprise a officiellement déposé une nouvelle requête auprès du Centre international pour le règlement des différends relatifs aux investissements (CIRDI). Ce conflit, qui s’intensifie, découle de la perte de contrôle d’Orano sur sa filiale nigérienne Somaïr (Société des mines de l’Aïr), dont elle détient 63,4 % des parts, le reste appartenant à l’État du Niger.
Cette démarche survient dans un contexte tendu. Depuis le coup d’État militaire de juillet 2023, le régime nigérien a renforcé ses mesures pour accroître sa souveraineté, notamment sur les ressources stratégiques telles que l’uranium. Pour Orano, cette situation se traduit par des difficultés commerciales et une impossibilité d’exercer ses droits d’enlèvement, ce qui a aggravé la situation financière de Somaïr.
Une impasse commerciale et financière
Selon Orano, l’État du Niger a bloqué la commercialisation de 1 300 tonnes de concentré d’uranium, évaluées à environ 250 millions d’euros. Ces actions, dénoncées par l’entreprise comme une violation de ses droits contractuels, ont conduit à une suspension de la production à Somaïr depuis le 31 octobre 2024. En parallèle, la société française a subi une perte de 133 millions d’euros au premier semestre 2024, affectée principalement par ses activités au Niger.
Malgré plusieurs tentatives de règlement à l’amiable, le groupe affirme que ces discussions sont restées sans réponse. Cette nouvelle procédure d’arbitrage vise à obtenir des dommages et intérêts, tout en affirmant les droits d’Orano sur les stocks miniers concernés.
Un contexte stratégique et juridique
Le Niger, quatrième producteur mondial d’uranium en 2022, représente une ressource clé pour les ambitions énergétiques mondiales et les besoins européens en énergie nucléaire. Orano, dont le capital est détenu à 90 % par l’État français, dépend fortement de cette ressource pour ses activités. Cependant, la montée des tensions politiques et les décisions unilatérales du régime nigérien mettent en lumière les risques inhérents aux investissements dans des régions instables.
Ce n’est pas la première fois qu’Orano recourt à l’arbitrage pour défendre ses intérêts au Niger. En décembre 2024, une première requête avait été déposée après le retrait du permis d’exploitation du gisement d’Imouraren, un site dont les réserves sont estimées à 200 000 tonnes d’uranium.
La résolution de ces litiges pourrait influencer l’avenir du marché mondial de l’uranium et les relations économiques entre la France et le Niger, tout en soulignant les défis que rencontrent les entreprises opérant dans des environnements géopolitiquement sensibles.