Le nucléaire fait un retour fracassant dans les opinions. La crise énergétique exposant les faiblesses du système énergétique actuel. Le nucléaire, pourtant délaissé, pourrait redevenir une voie prioritaire.
Le nucléaire au secours de la crise énergétique
Depuis janvier 2021, le monde s’inquiète de l’envolée des cours de l’énergie. Le gaz, pivot de la transition écologique, à vue son cours augmenter de 350% depuis le début de l’année. À l’approche de l’hiver le risque de crise économique, voire de pénurie, est dans l’esprit des gouvernances mondiales.
Les causes de cette envolée sont multiples, mais essentiellement liées à la stratégie énergétique à l’œuvre. Face à la nécessité de réduire les émissions de carbone les initiatives se sont multipliées pour limiter les énergies fossiles. La baisse de production électrique a été compensée par des énergies bas carbone comme l’éolien ou le solaire.
Cependant, la variabilité des rendements et le manque d’investissements vers le nucléaire ont généré un déficit comblé par le GNL. Désormais, chaque pic de demande fait converger les acteurs de l’énergie vers le gaz naturel et génère des pénuries.
Cette situation montre les limites d’un système énergétique dépendant de sources intermittentes et peu diversifiées. Mais pour de nombreux experts le nucléaire peut résoudre le problème.
Une énergie longtemps mal aimée
Dans la transition énergétique, le nucléaire dispose de deux avantages : une production bas carbone et des rendements importants quasi continus. Le nucléaire semble donc être une solution d’apparence idéale, mais qui à de sérieux désavantages.
Comme l’ont montré les catastrophes de Tchernobyl et de Fukushima, les risques d’accidents sont faibles, mais les conséquences considérables. Les images des réacteurs nucléaires de Fukushima ont marqué l’opinion publique au point que l’Allemagne décide de fermer ses centrales.
Malgré tout, les rendements encore insuffisants des renouvelables ne donnent pas d’autre option que de compenser avec d’autres sources d’énergie. Et sans nucléaire, les alternatives restent le charbon et le gaz. C’est notamment le cas pour deux des plus grands investisseurs mondiaux dans les EnR, la Chine et l’Inde.
Face à l’envolée des cours du gaz, la Chine a massivement augmenté sa consommation de charbon. L’Inde a, quant à elle, menacé de retourner vers le charbon si les prix ne se stabilisaient pas. Cette crise montre bien que le tout renouvelable est difficilement concevable sans nucléaire ou rupture technologique.
Vers un retour au tout nucléaire ?
En France, le nucléaire fait son retour sur la scène politique. Selon de récents sondages, 30% seulement des Français souhaitent une sortie du nucléaire, contre 46% en 2011. Dans son plan d’investissement « France 2030 », le président Français a également affiché ses ambitions pour l’innovation nucléaire. Dans le même temps, les rumeurs de six nouvelles centrales nucléaire type EPR semblent se confirmer.
Aux États-Unis le plan d’aide de Joe Biden pour les énergies renouvelables semble suivre le même chemin. Ce plan de 150 milliards de dollars se verra complété par le Congrès d’un soutien à la filière nucléaire américaine. À noter que le nucléaire est l’un des rares sujets faisant l’objet d’un consensus entre républicains et démocrates.
La révolution des « Small Modular Reactors » (SMR)
La crise énergétique montre le besoin de flexibilité dans la production d’électricité. C’est exactement le but des SMRs. Ces réacteurs nucléaires de petites capacités permettraient un déploiement simple, à coût réduit grâce à une production de série. Selon Wood Mackenzie, ces réacteurs nucléaires auraient un rendement à 120$/MW, l’équivalent d’une centrale thermique avec capture de CO2.
Sachant la volatilité actuelle des hydrocarbures, cette solution a déjà séduit bon nombre de décideurs politiques. La France a déjà fait part de son intérêt dans le plan France 2030. Aux États-Unis le projet « Infrastructure investment and jobs bill » devrait être renforcé de crédit complémentaire pour les SMRs.
Mais dans la miniaturisation nucléaire, c’est bien la Chine et la Russie qui font la course en tête. Pékin prévoit la mise en place de sa première centrale nucléaire modulable sur l’île de Hainan en juillet 2021. La Russie a, elle, lancé sa première centrale nucléaire flottante, « Akademik Lomonossov » en 2019. La France ne prévoit pas de lancement de SMR avant 2035, les États-Unis avant 2028.
Les limites du tout nucléaire
Cet engouement pour le nucléaire doit cependant être mesuré. Si le nucléaire est idéal pour compléter les renouvelables les investissements restent colossaux et à très long terme. La construction de grandes capacités nucléaires se compte en décennies et les retombées économiques le sont à encore plus long terme.
Si les SMR laissent espérer un déploiement rapide, ils ne sont pas non plus sans risque. Cependant, l’urgence climatique pourrait servir de catalyseur vers une nucléarisation globale.