Le marché du charbon est donc en plein rebond, à la faveur d’une reprise économique et industrielle rapide et d’une pénurie de gaz mondiale.
L’IEA planche ainsi sur une augmentation de la consommation charbonnière au moins jusqu’en 2024.
Une reprise frénétique après une baisse de deux ans
Selon l’Agence internationale de l’Énergie (IEA), l’année 2021 a été marquée par un véritable échauffement des marchés du charbon. La demande mondiale a non seulement cru de 6%, mais les prix ont aussi atteint des valeurs records.
En octobre 2021, la tonne de charbon s’élevait ainsi à $240. Soit une hausse de 400% sur une année. Les stocks ont par ailleurs connu des tensions inhabituelles. Allant jusqu’à causer des pénuries en Chine et en Inde.
L’électricité en tête des sources de consommation de charbon
Derrière ce dynamisme des marchés se cache l’industrie sidérurgique, et surtout, la production d’électricité. En effet, la demande de charbon a augmenté en 2021 de 9% rien que pour l’électricité. Ainsi, la production à partir de charbon devrait atteindre en 2021 le niveau record de 10.350 TWh.
La demande de charbon métallurgie n’a, de son côté, augmentée que de 0,5%. Elle représente néanmoins 1106 millions de tonnes métriques.
Alors que les deux dernières années tendaient vers un déclin, le marché du charbon atteint aujourd’hui des niveaux historiques. Une tendance qui risque de s’affirmer selon l’IEA qui prédit une hausse de la demande jusqu’en 2024.
La faute au Covid-19
Les origines de cette effervescence sur le marché mondial du charbon sont multiples. Le facteur déclencheur est bien entendu la reprise économique à la hauteur de la crise exceptionnelle qui la précède. Selon l’IEA, la demande énergétique mondiale avait chuté de 4,5% en 2020 pour finalement augmenter de 5% en 2021.
Des variations et un différentiel record à l’origine des tensions sur les approvisionnements de matières énergétiques.
Mais surtout à la pénurie de gaz
Mais la cause principale est sans nul doute la pénurie de gaz. L’année 2021 a en effet été marquée par une inflation record des prix. En conséquence, de nombreux pays, principalement asiatiques, ont compensé leurs déficits par du charbon.
Si dans la configuration actuelle la demande ne devrait pas excéder le record de 2013-2014, l’ajout du facteur climatique pourrait y conduire. Selon l’IEA, des conditions météorologiques défavorables pourraient facilement pousser la demande à des niveaux bien supérieurs à ceux observés jusqu’à présent.
L’Asie concentre 80% de la demande
Le principal moteur du marché du charbon est avant tout l’Asie avec 80% de la consommation mondiale. En tête sur le continent, l’Inde, mais aussi et surtout la Chine qui concentre la moitié de la demande en charbon pour l’électricité.
Une domination qui porte à elle seule la hausse mondiale de la demande : +9% en Chine et +12% en Inde. En somme, les rebonds de la demande américaine et européenne restent marginaux en comparaison. D’autant que la consommation asiatique devrait continuer de grimper au contraire de la demande occidentale.
Premièrement, la Chine et l’Inde supportent à elles deux plus d’un tiers de la population mondiale (3 millions d’individus). Mais surtout, ces deux économies sont les usines du monde, notamment dans le secteur de la sidérurgie.
L’Industrie sidérurgique en quête de charbon : paradoxe écologique
Si le charbon thermique est aujourd’hui le centre de l’attention, le charbon métallurgique est appelé à connaitre une croissance fulgurante.
Selon BHP et North Coal, la demande de charbon à coke destiné à la sidérurgie est en hausse constante. En cause, le besoin mondial d’acier destiné à la transition écologique. L’acier est en effet largement utilisé dans la fabrication de voitures électriques et d’éoliennes. Deux industries amenées à croître considérablement.
En somme, en 2019, la Chine et l’Inde ont produit respectivement 996 et 111 millions de tonnes d’acier. Cela fait des deux industries les deux plus puissantes au monde.
Or, paradoxalement, cette production destinée aux verdissements des économies se fait sur la base de charbon à coke particulièrement émetteur en CO2. D’autant que les alternatives moins carbonées sont, pour l’heure, largement sous déployées.
L’IEA alerte sur les émissions de gaz à effet de serre
Pour l’IEA, cette ébullition du marché du charbon est particulièrement inquiétante. Le charbon étant la matière la plus émettrice de CO2. Dans ce contexte, les engagements climatiques deviennent tout simplement intenables. Notamment ceux pris lors de la COP26 en novembre 2021.
« Les engagements pris par de nombreux pays, dont la Chine et l’Inde […] devraient avoir de très fortes répercussions sur le charbon. Mais celles-ci ne sont pas encore visibles dans nos prévisions. », déclare Keisuke Sadamori, directeur des marchés et de la sécurité énergétique à l’IEA.
Il serait ainsi mal venu de dire que le charbon est une énergie d’avenir au vu de ses effets délétères sur le climat. Mais force est de constater que dans les périodes d’instabilité, le charbon reste une ressource refuge pour satisfaire une demande mondiale insatiable en énergie.