L’Ukraine, selon Vladimir Poutine, pourrait toujours faire transiter le gaz russe sur son territoire après 2024. Le président russe assure en effet que son pays respectera ses engagements commerciaux vis-à-vis de son voisin. Cependant, il demande que les partenaires se mettent d’accord sur le volume à faire transiter en Ukraine.
L’Ukraine craint de se faire court-circuiter
L’Ukraine pourrait toujours servir de point de transit pour le gaz russe après 2024, selon le président Vladimir Poutine. Lors de la conférence de presse commune qu’il a tenu avec la Chancelière Merkel le 20 août 2021, il a également spécifié qu’il fallait éclaircir certains points relatifs aux volumes de gaz avant de signer un nouvel accord de distribution avec l’Ukraine.
En 2019, l’entreprise Gazprom – dont l’État Russe est propriétaire à 50% – avait donné son accord pour y faire transiter 65 milliards de mètres cubes sur l’année 2020. Puis 40 milliards sur la période 2021-2024. Ce volume est significativement moins élevé que les 94 milliards de m3 transportés en 2017.
110 milliards de m3 transportés
La baisse de la quantité de gaz passant par son pays fait craindre au président Volodimyr Zelensky que l’Ukraine ne se retrouve marginalisée sur le plan économique. Mais également sur le plan politique. En effet, Nord Stream 2 vient doubler un gazoduc déjà existant. En reliant la Russie au port allemand de Lubmin, il permettra d’augmenter le volume de gaz naturel transporté à 110 milliards de m3 par an (contre 55 milliards aujourd’hui).
Cela permettra à l’Allemagne de devenir le principal centre de distribution en Europe. En outre, la route par la Baltique est beaucoup plus courte que celle passant par l’Ukraine. Volodymyr Zelensky craint donc que son pays ne se fasse « court-circuiter ».
L’arrêt des flux gaziers représenterait pour le pays une diminution significative de ses revenus. Effectivement, le transport du gaz permet au pays d’engranger des revenus supplémentaires sous la forme de royalties indexées sur les volumes passant par son territoire.
« Je pense que c’est une arme »
Sur le plan de la géopolitique, le président ukrainien et son gouvernement considèrent Nord Stream 2 comme une menace pour la sécurité en Europe.
« Je pense que c’est une arme. Je crois que ne pas se rendre compte que c’est une arme dangereuse, pas seulement pour l’Ukraine, mais pour toute l’Europe, est une erreur », déclare Volodymyr Zelensky, lors de la conférence de presse commune qu’il a tenu avec Angela Merkel ce dimanche.
L’Ukraine au centre du pacte Germano-Américain
La chancelière Allemande – qui quittera ses fonctions après les élections de septembre 2021 – a signé un pacte avec les États-Unis. En échange de la levée des sanctions américaines à l’encontre de la Russie, le président Biden a négocié un accord avec l’Allemagne. Celui-ci vise à empêcher Moscou de se servir du gaz comme d’une arme contre l’Ukraine.
« Si la Russie devait tenter d’utiliser l’énergie comme d’une arme ou commettre d’autres actes agressifs à l’égard de l’Ukraine, l’Allemagne prendra des mesures […] y compris des sanctions, pour limiter les capacités d’exportation russes vers l’Europe dans le secteur énergétique. ».
Le pacte liant l’Allemagne et les États-Unis prévoit que les deux pays fassent tout leur possible pour que l’Ukraine continue de percevoir ses royalties une fois Nordstream 2 achevé.
Georg Graf Waldersee vient d’être nommé en tant que représentant spécial pour le transit gazier ukrainien par le gouvernement allemand. Aux États-Unis, c’est Amos Hochstein qui est le nouveau conseiller pour la sécurité énergétique du Département d’État.
Ces deux nominations ont pour objectif de favoriser une reconduite du contrat gazier entre Kiev et Moscou au-delà de l’échéance prévue, à la fin du mois de décembre 2024.
Les prix du gaz atteignent des records en Europe
Le contrat 2020-2021 prévoit que Gazprom fasse transiter 40 milliards de m3 par an via l’Ukraine. En cas de besoin, l’entreprise russe achète des capacités supplémentaires pour fournir ses clients européens. D’habitude, elle achète un grand volume de capacités supplémentaires quand les gazoducs qui contournent le pays sont saturés.
Or, au début du mois, un incendie dans une usine gazière s’est déclaré. Cet incident a conduit à réduire les importations russes de 40 millions de m3 par jour et s’est fait ressentir sur les prix : ils ont franchi la barre des $585 pour 1000 m3.
Si ces livraisons de l’entreprise russe sont habituellement fiables, l’évolution de sa stratégie laisse planer le doute. En effet, des analystes du secteur craignent que Gazprom et Moscou ne maintiennent la pression sur les volumes jusqu’à ce que Nord Stream 2 entre en service.
Vladimir Poutine avait déclaré – lors de sa rencontre avec Angela Merkel – que si la Russie livrera toujours du gaz via l’Ukraine après 2024, il fallait tout de même se mettre d’accord sur les volumes que les Européens étaient disposés à acheter.