La surproduction d’énergie solaire en Europe, principalement en Allemagne, en Espagne et en France, a des effets économiques considérables sur la rentabilité des producteurs d’électricité solaire. La forte croissance de la capacité installée dans ces pays a conduit à une chute des prix capturés, ce qui crée une pression financière accrue sur le secteur des énergies renouvelables. Ce phénomène, bien que lié à une production d’énergie plus propre, pose des questions cruciales sur la viabilité économique des investissements dans le solaire à grande échelle.
Impact majeur de la surproduction en Allemagne : Une baisse des prix sans précédent
En Allemagne, la situation est particulièrement alarmante. Le prix capturé pour l’énergie solaire a chuté de 61 % en juin 2025, atteignant 18,43 €/MWh, soit le plus bas niveau depuis mai 2020. Cette baisse importante est le résultat d’une production record de 29 TWh au deuxième trimestre 2025, avec une capacité de production ayant dépassé les 52 GW en juin. En dépit de cette forte production, le prix moyen de l’électricité a stagné, mettant à mal la rentabilité des producteurs d’énergie solaire.
Le taux de capture a également chuté, passant sous la barre des 33 %, son niveau le plus bas depuis plusieurs années. Cette situation a eu des répercussions directes sur les finances des producteurs, et le gouvernement a dû injecter 5,2 milliards d’euros (environ 6,2 milliards de dollars) pour maintenir l’équilibre du compte EEG (Erneuerbare-Energien-Gesetz), un système qui soutient financièrement les producteurs d’énergie renouvelable en Allemagne.
En outre, le nombre d’heures avec des prix négatifs a atteint un niveau record, avec plus de 300 heures au deuxième trimestre 2025. Cela représente une augmentation de 50 % par rapport à l’année précédente. Les producteurs se retrouvent contraints de payer pour décharger leur excédent d’énergie, aggravant ainsi les pertes financières dans un secteur déjà sous pression.
Espagne : Une croissance de la capacité, mais des prix capturés en baisse
En Espagne, bien que la situation soit moins dramatique qu’en Allemagne, la surproduction d’énergie solaire a aussi des répercussions sur la rentabilité des producteurs. En 2025, la production solaire a augmenté de 15 %, atteignant 15,5 TWh au premier semestre. Cependant, cette croissance rapide de la capacité installée, qui a atteint 17 GW en 2025, a entraîné une baisse des prix capturés de 40 %, avec un prix moyen de 26 €/MWh en juin 2025, contre 43 €/MWh en 2024.
La montée en flèche des heures négatives a également affecté le marché espagnol. Bien que le nombre d’heures avec des prix inférieurs à zéro soit moins élevé qu’en Allemagne, il a tout de même doublé par rapport à l’année précédente. Cette tendance montre que même les producteurs espagnols doivent désormais chercher des solutions pour stabiliser leurs revenus, notamment en explorant des contrats d’achat d’électricité à long terme (PPA), qui offrent des revenus garantis malgré la volatilité des prix du marché.
France : Une pression croissante sur la rentabilité des producteurs
En France, la situation est quelque peu plus stable, mais des signes de pression apparaissent également. Le prix moyen capturé pour l’électricité solaire a baissé de 28 % en juin 2025, atteignant 30 €/MWh, contre 42 €/MWh en juin 2024. Cette chute est liée à l’augmentation continue de la production solaire, qui a vu une capacité installée de 3,5 GW supplémentaires en 2024, portant le total à 15 GW.
Bien que le taux de capture soit relativement plus stable en France qu’en Allemagne ou en Espagne, la baisse des prix de marché continue de réduire la rentabilité des producteurs. Cela crée une incertitude sur la viabilité financière à long terme des projets solaires. Les producteurs doivent désormais trouver des moyens d’adapter leurs modèles économiques, y compris en intégrant des solutions de stockage d’énergie et en négociant des contrats à long terme.
Conséquences économiques : Une rentabilité mise à mal
Les pertes financières liées à la baisse des prix capturés sont significatives. En Allemagne, les producteurs ont enregistré une diminution de leur rentabilité de 30 % à 40 % par rapport à l’année précédente. En Espagne, des producteurs ont été contraints de renégocier leurs contrats pour garantir un revenu plus stable, face à la chute des prix. Les producteurs français, quant à eux, doivent faire face à des marges bénéficiaires de plus en plus faibles en raison de la volatilité des prix et de l’augmentation de la production.
L’impact sur les investissements dans le secteur est également notable. Les investisseurs dans les projets solaires commencent à s’interroger sur la rentabilité à long terme du solaire en Europe, avec des rendements désormais moins prévisibles. La nécessité d’adopter des technologies de stockage devient incontournable pour garantir une rentabilité stable, surtout pendant les périodes de forte production.
Réponses politiques : Ajustements nécessaires et solutions de stockage
Face à cette dynamique, les gouvernements européens, notamment en Allemagne, ont déjà commencé à réformer leurs systèmes de soutien. Le compte EEG a été réajusté pour limiter les subventions directes aux producteurs d’énergie solaire et favoriser l’intégration du stockage d’énergie. Ces réformes visent à mieux gérer l’excédent d’énergie pendant les périodes de forte production, tout en soutenant les producteurs à travers des mécanismes plus flexibles.
En Espagne et en France, des réformes similaires sont envisagées pour réajuster les incitations fiscales et pour encourager des modèles économiques durables pour les producteurs. Les contrats à long terme (PPA) sont également vus comme un moyen d’offrir des revenus stables, tout en réduisant la dépendance aux fluctuations du marché.
Le rôle du stockage d’énergie dans l’avenir du solaire européen
Le stockage d’énergie émerge comme une solution essentielle pour maximiser la rentabilité des projets solaires. En Allemagne, des projets de stockage à grande échelle, utilisant des batteries lithium-ion et des systèmes de stockage hydraulique, sont en développement pour mieux gérer l’excédent d’énergie solaire. Ces technologies permettent aux producteurs de stocker l’énergie excédentaire et de la réinjecter dans le réseau à des moments plus profitables.
La flexibilité du marché, combinée à une meilleure gestion des ressources et à des solutions de stockage innovantes, sera cruciale pour soutenir le secteur solaire européen et garantir sa rentabilité à long terme.