Lhyfe, acteur dans la production d’hydrogène vert en France, estime que le manque de demande est un obstacle majeur au développement de cette énergie. L’hydrogène vert coûte entre 5 et 6 euros par kilogramme en production, un prix bien supérieur à l’hydrogène gris, dont le coût oscille entre 3 et 5 euros. Lorsqu’il est transporté par camion, l’hydrogène vert peut atteindre un coût de 10 à 20 euros par kilogramme. Cette différence de coût limite l’intérêt des industries, qui doivent arbitrer entre objectifs environnementaux et contraintes financières.
Pour pallier ce problème, Matthieu Guesné, PDG de Lhyfe, propose l’instauration de « compléments de rémunération » pour les consommateurs, tant que la pénétration du marché ne dépasse pas les 10 %. Il cite l’exemple des Pays-Bas et de la Grande-Bretagne, où de telles mesures ont déjà été mises en place. Ces mécanismes d’incitation visent à combler l’écart de prix entre l’hydrogène vert et gris, rendant le premier plus accessible aux industriels.
Un soutien financier insuffisant en France
En France, un plan d’aide de 4 milliards d’euros destiné à soutenir la demande en hydrogène vert, initialement annoncé, n’a pas encore été déployé. Ce retard contraste avec d’autres pays européens, comme le Danemark, où les aides à la consommation ont permis d’établir un marché plus dynamique. Là-bas, les subventions ont été progressivement réduites une fois que le marché a commencé à être autosuffisant, grâce à une demande industrielle accrue.
Le secteur de l’hydrogène en France bénéficie déjà d’aides pour les producteurs d’électrolyseurs, comme le prévoient le plan France 2030 et les programmes européens PIIEC. Cependant, ces mesures se concentrent sur l’offre et ne suffisent pas à déclencher une demande industrielle suffisamment forte pour stabiliser le marché. Les industries, notamment celles des engrais, polymères, colles et acier, restent sensibles aux coûts, et sans aides supplémentaires, l’adoption de l’hydrogène vert reste limitée.
Développement et compétitivité en Europe
Lhyfe développe actuellement sa production avec une usine en Vendée et prévoit de multiplier ses installations, notamment en Allemagne. Cependant, Matthieu Guesné souligne que la dynamique de croissance est plus favorable outre-Rhin et aux Pays-Bas, où les projets avancent plus rapidement qu’en France. Ce décalage met en lumière les différences de soutien et d’incitation entre pays européens.
Le potentiel de croissance de l’hydrogène vert est pourtant significatif. Sur les 10 000 usines les plus émettrices de CO2 en Europe, environ 6 700 pourraient bénéficier de l’hydrogène pour réduire leurs émissions. La croissance du marché européen de l’hydrogène dépendra donc en grande partie de la capacité des États à soutenir les premiers utilisateurs, rendant le marché plus attractif pour de nouveaux entrants.
Vers une harmonisation des politiques européennes
L’évolution du secteur de l’hydrogène en Europe repose sur une harmonisation des politiques de soutien entre les différents pays membres. Alors que certains marchés, comme ceux des Pays-Bas et de l’Allemagne, ont pris de l’avance grâce à des politiques incitatives robustes, d’autres, comme la France, doivent encore définir des mécanismes de soutien adaptés aux consommateurs pour dynamiser la demande. Une coordination accrue entre les politiques nationales et les directives européennes pourrait favoriser un marché unique plus compétitif.