Les récents ajustements politiques et économiques opérés par les États-Unis et l’Union européenne modifient substantiellement le paysage du financement international dédié à la transition énergétique africaine. Avec le retrait des États-Unis de l’accord de Paris et la réduction drastique des aides européennes, les projets énergétiques africains doivent désormais affronter une réalité financière profondément remaniée, plaçant le secteur privé au premier plan.
Baisse drastique des aides américaines
Sous l’administration Trump 2.0, les États-Unis ont officiellement abandonné leurs engagements en matière de financement climatique en Afrique, entraînant notamment l’arrêt du programme Power Africa, initialement destiné à promouvoir l’accès à l’électricité sur le continent. Cette décision implique la suspension des aides au sein du partenariat international pour une transition énergétique juste (JETP, Just Energy Transition Partnership), affectant principalement l’Afrique du Sud, dont la transition hors du charbon reposait fortement sur ces fonds. L’impact immédiat s’est manifesté par le blocage récent d’un décaissement de 500 millions de dollars de la part des Climate Investment Funds (CIF), institution liée à la Banque mondiale, sous pression américaine. De plus, l’Export-Import Bank (Eximbank) des États-Unis, historiquement limitée dans ses engagements africains, prévoit désormais de cesser tout soutien aux projets liés aux énergies renouvelables, réorientant sa stratégie vers le financement de projets liés aux énergies fossiles.
Réduction des financements européens
En Europe, la remise en cause du Green Deal européen par certains acteurs politiques et économiques, ainsi que les conclusions du récent rapport Draghi sur la compétitivité, ont poussé l’Union européenne à revoir la structure et les priorités de son financement extérieur. Si l’Union européenne a réaffirmé son engagement envers l’Afrique via l’initiative « Global Gateway » et la campagne « Scaling up Renewables in Africa », les contraintes budgétaires, aggravées par l’urgence d’accroître les dépenses militaires, entraînent une réduction significative des aides publiques. Plusieurs pays européens ont d’ailleurs déjà annoncé une baisse allant jusqu’à 40 % de leurs budgets destinés à l’aide internationale, renforçant ainsi la nécessité d’une participation accrue du secteur privé dans les projets énergétiques africains.
Les défis d’une nouvelle structure de financement
La réduction marquée du financement public international contraint désormais l’Afrique à une dépendance accrue vis-à-vis du secteur privé, une transition qui présente des défis importants pour les économies africaines. Historiquement, moins de 2 % des investissements mondiaux en énergies renouvelables ont bénéficié à l’Afrique, en raison de projets souvent jugés insuffisamment rentables par les investisseurs privés. Le manque de projets bancables en Afrique subsaharienne, aggravé par des facteurs tels que l’instabilité politique, le risque de change, la faiblesse des infrastructures énergétiques et la fragilité des sociétés nationales d’électricité, limite fortement l’attractivité du continent auprès des investisseurs privés internationaux.
Impact sur les engagements climatiques africains
Ces évolutions financières risquent également d’influencer les engagements africains en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES) et de méthane, obligations pourtant cruciales pour les échanges commerciaux internationaux, notamment avec l’Europe. De nombreux engagements pris par les pays africains lors du récent sommet climatique continental restent conditionnés à la mobilisation de fonds internationaux. Face à la diminution du financement extérieur, les pays africains pourraient être tentés de revoir à la baisse ou de reporter leurs contributions nationales déterminées (NDC, Nationally Determined Contributions) devant être soumises avant la COP prévue au Brésil en novembre 2025.
Le retrait américain et les ajustements européens suscitent des interrogations sur la viabilité à court terme des objectifs énergétiques africains. Les pays du continent devront ainsi réévaluer rapidement leur stratégie financière pour maintenir leurs ambitions de transition énergétique.