Le réacteur nucléaire EPR, dont Londres vient d’approuver la construction pour sa centrale de Sizewell, est un réacteur de troisième génération conçu pour offrir une puissance et une sûreté accrues qui a également été construit, avec plus ou moins de difficultés, en Chine, en Finlande et en France.
L’EPR est un projet phare pour l’électricien français EDF, qui prévoit d’en livrer au gigantesque projet indien de Jaitapur, mais doit aussi répondre à la probable relance d’un programme nucléaire en France.
Aujourd’hui, deux centrales sont en marche, en Chine et en Finlande. En Finlande, l’autorité de sûreté nucléaire a autorisé fin décembre le démarrage du réacteur nucléaire EPR d’Olkiluoto 3, après 12 ans de retard sur le chantier, le premier pour un réacteur de ce type.
Jusqu’alors, la centrale de Taishan, près de Hong Kong, était le seul site en service, mais son réacteur numéro 1 est à l’arrêt depuis juillet 2021 après un incident “technique”, qualifié de “courant” par Pékin.
Puissance très élevée
Lancée en 1992, cette technologie a été codéveloppée par le français Areva et l’allemand Siemens au sein de leur filiale commune, dont Siemens s’est depuis retiré. EDF a finalement pris le contrôle de l’activité lors de la réorganisation de la filière nucléaire française orchestrée par l’État.
Conçu pour fonctionner pendant 60 ans, l’”European Pressurized Water Reactor” se fonde sur la technologie des réacteurs à eau sous pression, la plus utilisée dans le monde. Il offre une puissance très élevée (1.650 mégawatts) et bénéficie d’une multiplication des systèmes de sauvegarde pour refroidir le cœur du réacteur en cas de défaillance, d’une coque de protection en béton et acier et d’un récupérateur de corium censé réduire les conséquences en cas d’accident grave.
Retards en France et Finlande
Le premier chantier a été lancé à Olkiluoto (Finlande) en 2005, pour le compte de l’électricien TVO, avec Areva et Siemens comme maîtres d’œuvre. Il devait s’achever en 2009, mais contretemps et dérapages budgétaires ce sont accumulés et il a démarré avec près de 12 ans de retard. Pour autant, sa production régulière a été repoussée à décembre 2022, après l’observation de “corps étrangers” dans le réchauffeur de vapeur de la turbine.
Le seul EPR français en chantier, depuis 2007, est à Flamanville (Manche) et a également accumulé les déconvenues, à cause d’anomalies sur l’acier du couvercle et du fond de la cuve et de problèmes de soudures. Avec onze ans de retard et un coût multiplié par près de quatre, le groupe vise maintenant un chargement du combustible au second trimestre 2023 et il faudra changer avant fin 2024 le couvercle de la cuve.
En service en Chine; surcoûts en Angleterre
Concernant les deux EPR chinois, Taishan 1 a été le premier au monde à entrer en service, en décembre 2018, bien que le chantier ait commencé en 2009, après celui de Flamanville. Il est aujourd’hui arrêté depuis plus d’un an, le deuxième est en service.
L’EPR a été retenu pour un projet de deux réacteurs à Hinkley Point en Angleterre. Le début de production d’électricité par le premier réacteur britannique est à présent prévu mi-2027 au lieu de fin 2025 comme annoncé initialement, avec des coûts rehaussés.
Quant au projet de Sizewell C, mené par EDF, il s’est trouvé plombé par les retards, du fait de difficultés de financements et de complications politiques britanniques, jusqu’à ce que le gouvernement donne son feu vert mercredi.
EDF a pour autant bon espoir de vendre de nouveau l’EPR à l’étranger, tablant sur la volonté des pays d’améliorer leur bilan climatique et notamment de moins dépendre du charbon. Il table sur la vente de six EPR pour la future centrale de Jaitapur, et discute avec des pays européens comme la Pologne ou la République tchèque. En France même, pays le plus nucléarisé au monde (par habitant), le gouvernement soutient la commande de six voire 14 réacteurs, pour une mise en service attendue au mieux en 2035-2037.
En attendant, EDF travaille sur une nouvelle version de l’EPR, l’”EPR2″, censé être “plus simple à construire”, bénéficiant d’un effet de série (construction par paires), de préfabrication en usine, et “totalement conçu de façon numérisée”, selon EDF.