La consommation d’électricité en Europe n’a pas progressé de manière significative depuis deux décennies, retardant la stratégie de décarbonation portée par l’Union européenne. En France, cette dynamique se reflète par une hausse modérée de 0,7 % en 2024, après deux années consécutives de recul. Cette augmentation reste insuffisante pour retrouver les niveaux de la période 2014-2019, avec une consommation toujours inférieure de 6 %.
Une progression lente face à des objectifs ambitieux
À l’échelle de l’Union européenne, la consommation électrique a augmenté de 1,5 % en 2024, selon les chiffres des opérateurs énergétiques. Cette faible progression contraste avec les ambitions de neutralité carbone fixées pour 2050. La part de l’électricité dans la consommation énergétique globale reste stable autour de 23 % depuis près d’une décennie, d’après Eurelectric, représentant du secteur. Cette lente électrification des usages concerne notamment l’industrie, où seuls 4 % des procédés thermiques fortement émetteurs sont actuellement électrifiés.
Des conditions économiques peu favorables
Le différentiel de prix entre l’électricité et le gaz demeure un facteur limitant. Bien que le gaz soit toujours deux fois plus cher qu’avant la crise énergétique de 2022, son coût est redevenu soutenable pour les industriels. Le chef du Centre Énergie de l’Institut Jacques Delors, Phuc-Vinh Nguyen, explique que l’inefficacité des dispositifs fiscaux n’encourage pas la substitution. Il préconise un rééquilibrage de la taxation afin de stimuler l’électrification des usages.
Un essoufflement des technologies bas carbone
Les données publiées par l’Agence internationale de l’énergie (AIE) indiquent une baisse de 6 % des ventes de véhicules électriques en 2024, tandis que les ventes de pompes à chaleur ont chuté de 21 %. Ces reculs marquent un ralentissement dans le déploiement des technologies électriques. En parallèle, la France a enregistré un excédent historique de 89 térawattheures (TWh) d’exportations d’électricité en 2024, illustrant une production disponible qui ne parvient pas à générer une demande accrue.
Des tensions politiques sur les orientations énergétiques
Face à cette dynamique atone, des débats émergent au sein du Parlement français concernant la trajectoire de développement des énergies renouvelables prévue pour 2025-2035. Certains élus souhaitent en réduire l’ampleur, invoquant une demande trop faible pour justifier les investissements. Thomas Veyrenc, directeur exécutif chez Réseau de transport d’électricité (RTE), insiste sur la dimension stratégique de l’électrification, considérée comme un levier de souveraineté énergétique pour la France et ses voisins européens.