L’ambition de l’ancien président Donald Trump de simplifier les approbations de projets énergétiques s’appuie sur un plan controversé visant à réorganiser la fonction publique fédérale. Dans ce cadre, le rétablissement du « Schedule F », une mesure introduite sous son premier mandat, est central. Ce plan pourrait permettre de licencier des milliers de fonctionnaires fédéraux et de remplacer les experts techniques par des nominations politiques, ce qui aurait des répercussions sur les processus de révision des permis, notamment ceux liés à la loi sur la politique environnementale nationale (NEPA).
Le Schedule F, une catégorie d’emploi fédérale introduite par un décret de Trump en octobre 2020, retirerait les protections traditionnelles dont bénéficient les fonctionnaires de carrière. Cette mesure a pour but d’accélérer les décisions concernant les grands projets d’infrastructures, en particulier dans le secteur de l’énergie. Toutefois, des experts en permis fédéraux estiment que cette accélération pourrait, au contraire, aboutir à des retards supplémentaires, notamment en raison de litiges potentiels.
Une expertise technique remplacée par des nominations politiques
Nikki Chiappa, directrice du programme de permis du Breakthrough Institute, souligne que le remplacement des fonctionnaires spécialisés dans les révisions NEPA par des personnalités politiques sans expertise technique pourrait rendre les évaluations environnementales plus vulnérables aux recours en justice. Selon Chiappa, la qualité des examens pourrait diminuer, exposant ainsi ces projets à des retards judiciaires prolongés.
Le programme Schedule F pourrait également provoquer une hémorragie de talents parmi les experts fédéraux, augmentant ainsi la charge de travail pour les rares spécialistes restants. Cette situation risquerait de compromettre la rapidité des approbations, un objectif pourtant central dans la stratégie de Trump.
Des impacts sur les projets d’énergie renouvelable
Bien que Trump ait manifesté son soutien aux projets d’extraction minière et d’exploitation des combustibles fossiles, ses critiques fréquentes à l’encontre des énergies renouvelables, en particulier l’éolien, sont bien connues. Si le Schedule F est réintroduit, la nomination de personnes politiquement alignées pourrait ralentir les projets d’énergie verte, y compris ceux soutenus par l’administration Biden, comme les projets éoliens offshore ou solaires.
Le rapport « Project 2025 », rédigé par la Heritage Foundation, va dans ce sens en recommandant que le rôle de directeur exécutif du Permitting Council — l’agence fédérale chargée de coordonner les examens environnementaux pour les projets prioritaires — soit confié à une personnalité nommée par le président, dotée de pouvoirs élargis pour influencer le rythme des approbations.
Risques accrus de retards judiciaires
La fragilité juridique des approbations délivrées sans une expertise technique solide pourrait paralyser de nombreux projets énergétiques. Une étude du Breakthrough Institute révèle que les litiges liés à la NEPA ont retardé en moyenne les projets de 3,9 ans entre 2013 et 2022, qu’il s’agisse de projets d’énergies fossiles ou renouvelables. En l’absence d’un cadre robuste pour faire face aux contestations judiciaires, ces retards pourraient s’aggraver sous une administration Trump appliquant le Schedule F.
Christine Tezak, directrice chez ClearView Energy Partners, affirme que les projets déjà en construction ne sont probablement pas menacés, mais que de nouveaux projets pourraient être plus vulnérables. Si les examens environnementaux sont perçus comme étant moins rigoureux, les opposants aux projets auraient davantage de motifs pour les contester devant les tribunaux.
Un pari risqué pour l’avenir des projets énergétiques
En définitive, la volonté de Trump de rationaliser les approbations de projets énergétiques pourrait se heurter à des obstacles imprévus. En réduisant le rôle des experts techniques au sein de l’administration, il est probable que de nombreux projets soient embourbés dans des contentieux juridiques. Sans réformes législatives pour limiter les recours, notamment ceux liés à la NEPA, le risque est que cette stratégie, censée accélérer les projets, finisse par les ralentir encore plus.