Selon la nouvelle analyse de Rystad Energy, la quantité de pétrole récupérable dans le monde a baissé de 9% depuis l’année dernière. Cela pourrait avoir des conséquences significatives sur la sécurité énergétique mondiale.
Une baisse de 9% du pétrole récupérable en 2022
On parle de pétrole récupérable lorsqu’on désigne le « pétrole brut et le condensat restants techniquement récupérables. » Il s’agit alors de volumes prévus calculés en tenant compte des champs exploités, découverts et des potentielles découvertes futures. Rystad Energy, qui publie chaque année son analyse du paysage énergétique mondial, souligne une baisse considérable de ces ressources en 2022.
Ainsi, Rystad estime 1.572 milliards de barils de pétrole récupérable dans le monde, soit 9% de moins que l’année dernière. En 2021, la société norvégienne comptait 152 milliards de barils de plus au total. En cause : la production de 30 milliards de barils en 2021, ainsi qu’une réduction significative des ressources non découvertes.
Le secteur offshore américain est celui ayant le plus contribué aux quelque 120 milliards de barils de ressources non découvertes. Ainsi, 20 milliards de barils resteront dans le sol états-unien, majoritairement par le fait d’interdictions d’opérations sur le territoire fédéral.
De l’équilibre entre environnement et économie
De plus, selon Rystad, seuls 1.200 des 1.572 milliards de barils techniquement récupérables sont susceptibles d’être économiquement viables avant 2100. L’analyse se fonde ici sur un prix de 50$/baril. Par ailleurs, ce pétrole économiquement viable contribuerait à environ 0,1°C de réchauffement climatique supplémentaire d’ici 2050.
Per Magnus Nysveen, responsable de l’analyse chez Rystad Energy, souligne la contrepartie économique à cette bonne nouvelle environnementale:
« Si la baisse de la disponibilité du pétrole est une bonne nouvelle pour l’environnement, elle peut menacer de déstabiliser davantage un paysage énergétique déjà précaire. La sécurité énergétique est une question de redondance ; nous avons besoin de plus de tout pour répondre à la demande croissante de transport et toute action visant à réduire l’offre se retournera rapidement contre les prix à la pompe dans le monde entier, y compris chez les grands producteurs comme les États-Unis. Les politiciens et les investisseurs peuvent trouver le succès en ciblant la consommation d’énergie, en encourageant l’électrification du secteur des transports et en améliorant radicalement l’efficacité des carburants. »
Quel impact sur le réchauffement climatique ?
Rystad Energy analyse également les implications climatiques du volume total de pétrole récupérable estimé. Ainsi, si celui-ci devait être brûlé immédiatement, cela impacterait le réchauffement climatique de +0,25°C. Rystad se fonde pour cela sur une base de 350 kg de CO2 émis par baril, avec un réchauffement de +0,1°C par 220 Gt de CO2 émis.
Dans cette optique, 35% des émissions carbone de ce pétrole seraient encore dans l’atmosphère en 2100. De fait, 80 ans sont nécessaires au CO2 afin qu’il soit naturellement éliminé de l’air. En outre, une partie du carbone ne serait libérée que par l’incinération de plastiques, produits à partir de pétrole.
Le rapport de Rystad Energy met également à jour les estimations du volume de pétrole non découvert. Ceux-là passent ainsi de 1.000 milliards de barils (2018) à 350 milliards, en raison d’un désintérêt des investisseurs pour l’exploration. Selon Rystad, c’est une bonne nouvelle pour les objectifs carbone, qui pourrait néanmoins compromettre la sécurité énergétique mondiale.
L’inégale répartition des réserves prouvées autour du globe
Par ailleurs, l’analyse expose un « ensemble cohérent de probabilités prudentes » concernant les réserves prouvées. Rystad souligne des « différences significatives » dans la longévité des réserves prouvées entre les membres de l’OPEP et les autres pays. Ainsi, tous les membres de l’OPEP ont des réserves prouvées pour plus de 10 ans – quatorze ans pour l’Arabie saoudite.
Le Mexique se classe dernier des pays non-membres de l’OPEP, avec moins de cinq ans de réserves prouvées. À l’inverse, selon l’analyse de Rystad Energy, les réserves du Canada devraient durer près de 20 ans.
Rystad Energy établit un classement des plus grandes nations pétrolières
L’Arabie se classe également première au classement du volume de pétrole récupérable, avec 275 milliards de barils. Les États-Unis suivent avec 193 milliards, puis la Russie (137 milliards), le Canada (118 milliards) et l’Irak (105 milliards). Contrairement à la tendance majoritaire, les États-Unis ont ajouté 8 milliards de barils à leurs ressources découvertes cette année.
Du côté de l’Amérique du Sud, le Brésil reste en tête, avec 71 milliards de barils de pétrole récupérable. C’est 10 fois le volume de ses réserves prouvées, mais quatre milliards de barils en moins par rapport à 2021. En Europe, les volumes récupérables du Royaume-Uni (10 milliards) et de la Norvège (17 milliards) ont aussi diminué d’un milliard.
À noter que l’évaluation des ressources effectuée par Rystad Energy est datée du 1er janvier 2022. Ainsi, l’analyse ici exposée reflète l’état des ressources récupérables restantes dans le monde au début de cette année.