Le volet dédié aux carburants d’aviation durables (CAD ou SAF pour Sustainable Aviation Fuels) du Contrat Stratégique de Filière Nouveaux Systèmes Énergétiques (CSF NSE) a été officiellement signé par les ministres Éric Lombard, Marc Ferracci et Philippe Tabarot, ainsi que des dirigeants industriels, syndicaux et d’entreprises aéronautiques. Ce volet définit une feuille de route concrète pour la période 2024-2027, orientée vers la création d’une filière industrielle souveraine, compétitive et durable. Quatre priorités structurent le plan : augmenter la capacité de production nationale, garantir la compétitivité et la conformité des produits, créer les conditions favorables aux investissements industriels et lancer les premiers projets significatifs avant 2030. L’objectif est notamment de couvrir intégralement les besoins français en SAF tout en explorant des opportunités à l’exportation.
Objectifs industriels à l’horizon 2030
La France ambitionne de devenir autonome en matière de carburants d’aviation durables, intégrant à la fois des biocarburants et des carburants synthétiques produits à partir d’hydrogène renouvelable et de dioxyde de carbone capturé (eSAF et ebioSAF). Le gouvernement entend faciliter les prises de décisions finales d’investissement (FID ou Final Investment Decisions), indispensables pour structurer cette filière émergente. Les mesures envisagées incluent notamment la mise à disposition de terrains adaptés aux implantations industrielles et un soutien renforcé aux projets jugés stratégiques par l’État français.
Par ailleurs, afin de maintenir un marché équitable, le gouvernement prévoit d’instaurer des mécanismes de contrôle renforcés sur les importations de carburants, garantissant leur conformité aux standards de durabilité établis par la France et l’Union Européenne. Cette régulation vise à soutenir la compétitivité des entreprises françaises sur le marché national et international.
Cadre européen et contraintes industrielles
Cette initiative française s’inscrit dans les objectifs de neutralité carbone fixés par l’Union Européenne à l’horizon 2050. Le règlement européen ReFuelEU Aviation impose ainsi aux compagnies aériennes d’intégrer progressivement une part croissante de carburants durables dans leur consommation globale pour les vols au départ des aéroports européens. Si le renouvellement des flottes et l’amélioration des pratiques opérationnelles contribuent à réduire les émissions, les SAF sont identifiés comme le principal moyen d’atteindre ces objectifs ambitieux.
L’industrie française a déjà amorcé ce virage, avec plusieurs raffineries nationales engagées dans la production de biocarburants destinés à l’aviation. Quatre nouveaux projets de production d’eSAF et ebioSAF, récemment retenus dans le cadre de l’appel à projets CARB’AERO, bénéficient d’un soutien public significatif de 100 millions d’euros. Ces initiatives industrielles devraient permettre d’accroître la capacité française de production de carburants de synthèse dans les années à venir.
Mobilisation des acteurs industriels et institutionnels
La signature du volet SAF du CSF NSE réunit des acteurs clés tels que TotalEnergies, Air France, Schneider Electric et les représentants syndicaux, qui travaillent conjointement au développement et à la consolidation de la filière nationale. Cette dynamique collective est soutenue par les ministères français de l’Économie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique, de l’Industrie et de l’Énergie, ainsi que des Transports.
Les entreprises engagées soulignent l’importance stratégique de cette filière pour garantir à la fois une indépendance énergétique et industrielle, tout en renforçant la compétitivité de l’industrie aéronautique française. Les industriels prévoient notamment d’intensifier les investissements dans des installations de pointe, destinées à produire des carburants durables grâce à l’électricité bas carbone abondante en France.
Les différents acteurs espèrent que ce cadre stratégique permettra à la France d’être pionnière dans une industrie aéronautique confrontée à des contraintes environnementales et économiques croissantes. Le défi consiste désormais à traduire cette feuille de route en projets industriels concrets et compétitifs sur le marché mondial.