L’efficacité énergétique devient une priorité absolue dans un contexte d’urgence climatique, affirme Jalel Chabchoub, chargé des investissements en chef au Département des énergies renouvelables et de l’efficacité énergétique de la Banque africaine de développement. Selon ce spécialiste, il est temps d’agir en amont, du côté de la demande, pour faire face au « choc climatique » auquel nous sommes confrontés aujourd’hui. En effet, l’efficacité énergétique présente de nombreux avantages en Afrique et dans le monde, tels que la réduction des factures énergétiques, l’économie des ressources et l’amélioration de la compétitivité industrielle des pays.
Rôle central dans la transition énergétique
Pour les populations, l’efficacité énergétique se traduit par des factures moins élevées et la disponibilité de ressources supplémentaires pour d’autres dépenses. Quant aux opérateurs énergétiques, elle leur permet de réduire les coûts de production, de mieux gérer la demande et d’augmenter le pouvoir d’achat des consommateurs. Ainsi, l’efficacité énergétique joue un rôle central dans la transition énergétique, comme le souligne M. Chabchoub.
L’Afrique est particulièrement touchée par le choc climatique. En plus de connaître une augmentation des températures déjà élevées, le continent doit faire face à une demande croissante en matière de refroidissement, car le parc immobilier devrait doubler d’ici 2050 en raison de la croissance démographique. Depuis plus de dix ans, la Banque africaine de développement soutient activement les politiques gouvernementales en matière d’efficacité énergétique sur le continent.
L’institution s’appuie notamment sur le Fonds pour l’énergie durable en Afrique (SEFA), créé en 2011. Ce fonds spécial multi-donateurs fournit des financements visant à accélérer les investissements du secteur privé dans les énergies renouvelables et l’efficacité énergétique. Le SEFA offre une assistance technique et des instruments de financement concessionnels pour surmonter les obstacles du marché, développer des projets bancables et améliorer le profil de risque des investissements. Il vise notamment à améliorer l’efficacité des services énergétiques en utilisant diverses technologies et modèles commerciaux, y compris les mini-réseaux et les énergies renouvelables à petite échelle.
Création d’institutions publiques
L’une des approches stratégiques de la banque consiste à favoriser la création d’institutions publiques appelées « Super ESCO » (Super Energy Service Company). Ces sociétés de services énergétiques jouent un rôle de catalyseur en identifiant les projets d’efficacité énergétique qui seront ensuite confiés au secteur privé, sur la base d’un contrat de performance énergétique garanti. La première assistance technique a été accordée au Maroc en février 2021, avec un don de 965 000 dollars américains à la Société d’ingénierie énergétique pour lui permettre de devenir la première Super ESCO en Afrique. Sa mission sera de développer des projets d’efficacité énergétique dans les infrastructures publiques, notamment les bâtiments et les éclairages publics.
La banque adapte son soutien aux pays en fonction de leurs besoins. Elle contribue à identifier les programmes d’efficacité énergétique et favorise un environnement propice au développement du marché dans ce domaine. Par exemple, elle soutient en Égypte la mise en place de programmes d’efficacité énergétique, tels que le remplacement d’un million de réfrigérateurs à l’échelle nationale. En Namibie, elle encourage le développement de programmes de chauffe-eau solaire, tandis qu’au Mozambique, elle soutient le déploiement d’un éclairage public efficace et favorise l’adoption de modes de financement qui permettent de répartir dans le temps le coût de l’acquisition d’équipements énergétiquement efficaces (financement sur facture).
« Outre l’efficacité énergétique, la Banque africaine de développement soutient des projets de production d’énergies renouvelables tels que le complexe Noor Ouarzazate au Maroc, le projet géothermique de Menengai au Kenya et le parc solaire de Benban en Égypte », précise Jalel Chabchoub. Selon lui, « l’efficacité énergétique n’est pas seulement une question de financement ; c’est une question de leadership et de volonté pour avancer ensemble vers la réalisation des objectifs. » Il conclut en affirmant que « l’énergie la plus propre est celle que vous n’utilisez pas ! »