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Guerre et Transition Énergétique

L'invasion de l'Ukraine par la Russie transforme le marché des hydrocarbures, mais influe également la transition énergétique. Ainsi, l'interdiction européenne d'importer des produits russes modifie les flux commerciaux énergétiques. Wood Mackenzie analyse les conséquences de la guerre dans son nouveau rapport.

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Wood Mackenzie, cabinet de conseil et de recherche dans les nouvelles énergies, a publié sa nouvelle analyse. Dans le contexte actuel, la poursuite de la transition énergétique pourrait être plus coûteuse et plus carbonée.

Wood Mackenzie analyse les conséquences de la guerre

La guerre aura des conséquences économiques et énergétiques durables pour l’Europe. Massimo Di-Odoardo, vice-président de la recherche sur le gaz et le GNL chez Wood Mackenzie, le résume ainsi:

« Il est inconcevable que l’Europe abandonne ses stratégies de diversification et retourne à une dépendance significative vis-à-vis de la Russie. »

L’analyse repose sur l’hypothèse que l’Europe interdise tous les produits de base russes d’ici à la fin de 2024. Wood Mackenzie examine l’impact sur ces produits, ainsi que sur les investissements, la transition énergétique et la géopolitique d’ici 2030.

Le marché des hydrocarbures en pleine restructuration

L’économie mondiale est sous pression, et les prix de l’énergie connaissent une inflation structurelle. Selon le cabinet, il existe ainsi un risque réel de perte d’une partie de l’offre mondiale.

L’Europe souhaite augmenter sa production de GNL afin de limiter le gaz russe. En conséquence, les prix au comptant ont atteint des niveaux records, soutenant la forte demande au charbon. Au même moment, les risques liés à l’approvisionnement ont augmenté et l’inflation fait flamber les coûts du secteur de l’énergie.

Selon M. Di-Odoardo:

« Les prix seront structurellement plus élevés et l’interdiction du gaz russe sera plus difficile que celle des matières premières. Mais […] nous voyons déjà une nouvelle balance commerciale se dessiner. »

Ainsi, Wood Mackenzie prédit que la production domestique de charbon chinoise et indienne compensera la baisse des disponibilités maritimes. Il ajoute:

« Le risque le plus important pour la production pétrolière russe se situe peut-être à long terme et concerne la perte d’accès aux partenaires, technologies et services occidentaux. »

Le GNL est mis à l’honneur

L’étude de Wood Mackenzie souligne qu’une future interdiction du gaz russe entraînera une intensification de la concurrence pour le GNL. De fait, l’Europe se trouverait en concurrence avec l’Asie pour une croissance limitée de l’offre jusqu’en 2026 environ. Ainsi, parmi tous les hydrocarbures, le GNL semble être l’option la plus intéressante pour les prochaines années. M. Di-Odoardo explique:

« Une augmentation considérable dans les investissements dans les projets de GNL est soutenue par une augmentation rapide de la demande de GNL en Europe, les promoteurs américains cherchant déjà à remplir l’espace. »

En conséquence, M. Di-Odoardo évoque 50 millions de tonnes par an de nouvelles capacités américaines de production de GNL. Un potentiel qui pourrait doubler si l’Europe interdit les importations russes d’ici 2024. Des décisions d’investissement définitives seront prises dans les deux prochaines années.

Les chaînes d’approvisionnements mondiales, préoccupation première de Wood Mackenzie

Pourtant, d’après l’étude de Wood Mackenzie, ce sont les chaînes d’approvisionnement mondiales qui apparaissent comme la plus grande préoccupation actuelle. De fait, la hausse des coûts pourrait retarder les investissements dans l’approvisionnement. En conséquence, cela pourrait ralentir le rythme des investissements dans les énergies vertes, nécessaires aux objectifs de décarbonation.

M. Di-Odoarno explique:

« Les gouvernements, les entreprises et les investisseurs qui réussiront le mieux seront ceux qui sauront naviguer dans ces conditions de marché complexes pour accélérer la transition énergétique. »

Le rapport de Wood Mackenzie souligne donc l’importance d’une réponse rapide de la part des gouvernements, des investisseurs et des entreprises. Il dresse ainsi un portrait de ce que devrait être la réaction de ces acteurs face à la situation.

Gouvernements, investisseurs et entreprises : les réponses attendues

En ce qui concerne les gouvernements, le cabinet cible les pays disposant de ressources nationales en hydrocarbures et minéraux critiques. Il leur recommande de maximiser leur production à court terme, tout en intensifiant les investissements dans l’offre d’énergie à faible émission de carbone. Cette double approche vise à répondre rapidement à la crise, tout en répondant à la future demande à long terme.

Du côté des investisseurs, Wood Mackenzie prévoit que les investissements dans la transition énergétique, bien que plus coûteux, resteront compétitifs. Les énergies renouvelables européennes devraient augmenter rapidement. Grâce à la priorité de la sécurité énergétique, les hydrocarbures comme les infrastructures critiques devraient également conserver des rendements intéressants.

Ainsi, d’après le cabinet, le gaz naturel liquéfié semble l’investissement le plus attrayant. Il recommande cette option, bien qu’elle puisse s’avérer limitée à terme si l’Europe accélère ses objectifs de consommation nette zéro.

Enfin, d’après Wood Mackenzie, les entreprises n’ont pas à craindre de la rentabilité des hydrocarbures avant un certain temps. Les CPN continueront d’offrir des approvisionnements en pétrole et gaz à faible coût et à faible émission de carbone.

Cependant, les IOC devraient remplacer leurs investissements à grande échelle traditionnels par des projets énergétiques à faible émission de carbone. Le cabinet prévoit le même transfert pour les investissements des mineurs internationaux, habituellement dans des projets de charbon. Ainsi, les métaux pourraient être les prochains secteurs de croissance pour les sociétés pétrolières internationales riches en liquidités.

La transition énergétique est accélérée, mais coûteuse

Certains gouvernements européens ont déjà accéléré leurs stratégies de décarbonation en réponse à la guerre, et d’autres devraient suivre. De même, Wood Mackenzie s’attend à un soutien politique accru aux investissements dans les technologies émergentes afin d’accélérer la transition.

Cependant, cela exerce une pression sur les chaînes d’approvisionnement mondiales, déjà très sollicitées. Les coups des énergies renouvelables augmentent déjà, mais à un rythme moindre que celui des prix du charbon et du gaz. Wood Mackenzie évoque également une ruée sur les métaux nécessaires à l’électrification, potentiellement aggravée par la réduction des exportations russes.

Le rythme de la transition énergétique est peut-être plus soutenu, mais il est aussi plus coûteux. De plus, il est possible que son accélération la rende plus carbonée.

Néanmoins, le ralentissement de la croissance économique et les investissements à faible émission devraient compenser les pressions à la hausse sur les émissions. Par rapport à 2021, Wood Mackenzie prévoit ainsi une réduction des émissions de CO2 pouvant atteindre jusqu’à 15% d’ici 2035.

Le cabinet conclut pourtant en qualifiant cette estimation de maigre consolation. Selon lui, seule la limitation de l’amélioration du niveau et du mode de vie dans le monde permettrait de réduire les émissions.

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