Depuis plusieurs jours, la Guadeloupe fait face à des coupures d’électricité causées par une grève des agents d’EDF Production Électrique Insulaire (PEI). Ce mouvement social, déclenché par la branche énergie de la CGTG, repose sur un différend lié à l’application d’un accord signé en 2023. Cet accord, conclu après 61 jours de grève, visait à régulariser les contrats de travail des agents et à verser des arriérés de salaires sur une période de cinq ans.
Malgré cet accord, le syndicat accuse la direction d’EDF PEI de ne pas respecter ses engagements. Selon Jimmy Thélémaque, secrétaire général de la FE-CGTG, la direction refuserait de produire des bulletins de salaire conformes. Ce refus a entraîné une paralysie partielle de la production électrique sur l’île. En effet, la principale centrale diesel de l’archipel, qui assure 70 % de l’électricité locale, est à l’arrêt, forçant EDF à procéder à des délestages tournants pour éviter une surcharge du réseau.
Conséquences économiques et sociales des coupures
Les coupures d’électricité, qui affectent jusqu’à 115 000 foyers lors des pics de délestage, perturbent non seulement le quotidien des habitants mais aussi l’activité économique de l’île. Le manque d’électricité entraîne des coupures d’eau, fermant des écoles et ralentissant le fonctionnement de nombreuses entreprises. Les opérateurs téléphoniques signalent également des dysfonctionnements dans leurs services, accentuant la désorganisation générale.
Le secteur économique local, déjà fragilisé par la dépendance aux énergies fossiles, subit de plein fouet l’impact de cette grève. En effet, une telle interruption de la production électrique affecte gravement les entreprises, notamment celles opérant dans des secteurs énergivores comme l’industrie ou les services technologiques. Les coupures prolongées limitent les capacités de production, perturbent les chaînes d’approvisionnement et augmentent les coûts d’exploitation pour les acteurs économiques locaux.
Avancées limitées dans les négociations
Jeudi, après plusieurs jours de grève, des négociations ont repris entre la CGTG et la direction d’EDF PEI. Le syndicat a annoncé la remise en service de plusieurs moteurs de la centrale, permettant de rétablir l’électricité pour une partie des foyers affectés. Toutefois, 13 400 clients demeurent sans électricité, soulignant que la situation reste tendue.
Les discussions se concentrent actuellement sur la régularisation des salaires et la mise en conformité des bulletins de paie. Malgré une reprise partielle de l’activité, la CGTG reste sur ses positions, menaçant de nouvelles actions si ses demandes ne sont pas satisfaites dans les délais impartis. La direction d’EDF PEI, quant à elle, s’est abstenue de tout commentaire public tant que les négociations sont en cours.
Un système énergétique sous pression
La crise actuelle met en lumière les faiblesses structurelles du système électrique en Guadeloupe. La dépendance à une centrale diesel vieillissante, combinée à un climat social tendu, démontre la fragilité de l’approvisionnement en électricité de l’île. Les autorités locales ont signalé que des solutions temporaires, comme l’importation d’électricité depuis d’autres îles ou territoires voisins, ne sont pas viables à long terme en raison des contraintes logistiques et des coûts élevés.
La situation soulève également des interrogations sur la résilience du réseau électrique guadeloupéen, principalement alimenté par des énergies fossiles. Si des initiatives de décarbonation sont en cours, elles ne suffisent pas encore à réduire la dépendance aux combustibles fossiles dans les territoires insulaires. La mise en place de sources d’énergie renouvelables locales et une diversification des approvisionnements restent des priorités pour les acteurs du secteur.
Vers une modernisation nécessaire de la production électrique
Pour les professionnels du secteur, la grève met en évidence la nécessité de réformer profondément la production d’électricité dans les territoires insulaires français. La Guadeloupe, comme de nombreuses autres îles, repose encore largement sur des infrastructures obsolètes et des énergies fossiles pour répondre à ses besoins. La centrale diesel, principale source de production, n’est plus adaptée aux besoins croissants d’une population et d’une économie en développement.
Le conflit social actuel souligne également la nécessité d’une gestion plus rigoureuse des relations sociales au sein des entreprises du secteur énergétique. Les tensions entre syndicats et directions sont devenues fréquentes ces dernières années, compromettant la continuité des services essentiels. La modernisation du secteur doit passer par une meilleure intégration des revendications sociales afin de garantir la stabilité de la production et de l’approvisionnement.
L’avenir énergétique de la Guadeloupe repose donc sur des réformes structurelles visant à améliorer la résilience du réseau, la diversification des sources d’énergie, ainsi que sur une gestion plus proactive des relations sociales pour éviter les interruptions prolongées des services publics.