Les ressources financières de l’IRSN, expert technique de la sûreté nucléaire, doivent être repensées et revues à la hausse, alors que la France relance cette énergie, estime un rapport de la commission des finances du Sénat dévoilé jeudi.
Les capacités de l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN), établissement public chargé de l’expertise et de la recherche sur la sûreté nucléaire, doivent « impérativement être au niveau des enjeux à venir », estime le sénateur Jean-François Rapin, sénateur LR du Pas-de-Calais et auteur de ce rapport.
D’autant que, note-t-il, la dynamique des recettes de l’institut « est à la baisse depuis plus d’une décennie », dans un contexte alors de désaffection pour le nucléaire: les ressources sont passées progressivement de 301 millions d’euros en 2012 à 271 millions d’euros en 2022, « soit une chute de près de 10% en 10 ans », à peine enrayée en 2023 par un « petit coup de pouce budgétaire » de 8,7 millions d’euros pour le personnel, compte tenu de l’inflation.
Or avec la relance de l’atome portée par le gouvernement, les travaux d’expertise ne manqueront pas: « prolongation de la durée de vie des centrales existantes, mise en place des futurs réacteurs EPR2, démantèlement de la centrale de Fessenheim, projet Cigéo de stockage des déchets, émergence des petits réacteurs modulaires, adaptation des centrales au changement climatique », notamment.
En conséquence, « le rapporteur spécial estime qu’il sera nécessaire, au moins au cours des deux prochaines années, d’accroître les ressources budgétaires de l’IRSN de 20 millions d’euros par an », avec une réévaluation dans deux ans. Soulignant un effet « ciseaux » de cette baisse des ressources sur l’équilibre budgétaire, le rapport souligne la « fragilisation de la capacité de l’Institut à faire face à des investissements importants », alors que certains équipements scientifiques sont vieillissants.
Il préconise également de « sanctuariser » les moyens consacrés à la recherche, qui représentaient en 2010 48,7% des dépenses mais a baissé de près de 10 points, absorbant « majoritairement » la réduction des moyens. Autre sujet de préoccupation, la difficulté de recrutement de l’institut, qui, sur un marché de l’emploi tendu, pâtit de la « concurrence très forte du secteur privé » sur le plan des rémunérations.
Le rapport relaie ici une inquiétude exprimée par les syndicats en février, alors que le gouvernement tentait de réorganiser la sûreté nucléaire en fusionnant l’IRSN avec l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN), gendarme du nucléaire civil. Ce projet de fusion, controversé, n’est finalement pas passé via le projet de la loi d’accélération du nucléaire, mais l’exécutif n’y a pas renoncé et attend désormais un rapport à ce sujet de l’office parlementaire des choix scientifiques (Opecst).