La Chine domine actuellement le secteur de la construction nucléaire, avec des coûts de production bien inférieurs à ceux pratiqués en France. Cette compétitivité est le résultat d’une stratégie industrielle basée sur des économies d’échelle et un accès facilité au capital grâce à l’intervention directe de l’État. Cette combinaison permet à Pékin de maintenir un rythme soutenu dans le développement de son parc nucléaire, tout en contrôlant les dépenses.
Optimisation industrielle et réduction des coûts
L’efficacité du modèle chinois repose principalement sur la standardisation des processus de construction et l’industrialisation à grande échelle. Actuellement, 27 réacteurs sont en construction en Chine, un nombre qui permet de bénéficier d’économies substantielles sur l’achat de matériaux et la répétition des méthodes de construction. Cette approche permet de réduire considérablement le coût par unité de puissance installée.
En comparaison, le programme nucléaire français, notamment avec le développement des réacteurs EPR, souffre de la rareté des projets, ce qui limite les effets d’échelle. Les coûts de construction sont ainsi alourdis par des processus non standardisés et une organisation industrielle moins optimisée. La différence de stratégie se traduit par un écart important dans les coûts, les réacteurs chinois étant environ trois fois moins chers que leurs homologues européens.
Financement étatique et maîtrise du coût du capital
L’autre facteur clé de la compétitivité chinoise réside dans son modèle de financement. En Chine, les projets nucléaires bénéficient d’un soutien massif de l’État, ce qui se traduit par un coût du capital très faible. Contrairement à l’Europe, où les projets doivent souvent convaincre des investisseurs privés, exposés aux risques politiques et régulatoires, la Chine offre un cadre financier sécurisé et stable. Ce soutien étatique permet d’éviter les surcoûts liés aux taux d’intérêt élevés, courants en Europe, où le financement reste un obstacle majeur.
En France, les projets nucléaires sont confrontés à un environnement financier plus incertain. L’implication de l’État, bien que présente, n’atteint pas le niveau de soutien observé en Chine, ce qui alourdit les coûts finaux. Le financement de la centrale de Hinkley Point au Royaume-Uni, par exemple, a montré que l’absence d’un engagement étatique fort peut entraîner des surcoûts significatifs, affectant ainsi la compétitivité des projets nucléaires européens.
Implications pour le marché international
La Chine ne se contente pas de développer son parc nucléaire domestique à moindre coût ; elle ambitionne également de s’imposer sur le marché international. Le réacteur Hualong-1, déjà exporté vers des pays comme le Pakistan et l’Argentine, illustre cette stratégie. Bien que la pénétration du marché européen reste limitée, la compétitivité des réacteurs chinois pourrait susciter l’intérêt de certains pays d’Europe de l’Est, qui cherchent des alternatives au monopole russe de Rosatom.
L’inclusion du nucléaire dans la taxonomie verte par le Parlement européen en 2022 vise à attirer davantage de capitaux et à réduire le coût du capital en Europe. Cependant, sans une réorganisation industrielle profonde et un engagement financier plus soutenu de la part des États, les projets européens risquent de continuer à afficher des coûts nettement supérieurs à ceux des réacteurs chinois.
L’évolution de la compétitivité dans le secteur nucléaire dépendra largement de la capacité des pays européens à adapter leurs stratégies industrielles et financières. Le modèle chinois, combinant industrialisation massive et soutien étatique, pourrait bien redéfinir les standards du marché global.