Le producteur d’énergie Iberdrola a annoncé la cession de 757 mégawatts (MW) d’actifs renouvelables terrestres en France à l’entreprise indépendante française Technique Solaire. L’opération porte sur 118 MW déjà en service et 639 MW en développement, répartis entre éolien et solaire. Cette décision marque une étape dans la stratégie du groupe ibérique visant à lever EUR13bn ($14.1bn) via des rotations d’actifs pour soutenir un programme d’investissements de EUR58bn ($62.9bn) centré sur les réseaux et des marchés prioritaires.
Réduction de l’exposition au marché français terrestre
Iberdrola conserve sa présence dans l’éolien offshore avec le parc de Saint-Brieuc (496 MW), tout en se désengageant du segment onshore, jugé moins stratégique dans le contexte de sa réorientation vers des actifs capitalistiques régulés. Le portefeuille vendu correspond à une production estimée de 280 gigawattheures (GWh) annuels pour les capacités opérationnelles, avec un potentiel de plusieurs térawattheures pour le pipeline en développement.
La transaction intervient alors que le marché français connaît une pression croissante sur l’éolien terrestre, en raison de délais de permis prolongés, de recours juridiques fréquents et d’une acceptabilité sociale fragile. Le solaire, en revanche, connaît une accélération, avec une capacité installée ayant augmenté de 5.3 GW en 2024, contre 1.6 GW pour l’éolien.
Montée en puissance de Technique Solaire
Fondé en 2008, Technique Solaire élargit ainsi son portefeuille exclusivement français, historiquement dominé par le photovoltaïque, à une dimension plus éolienne. Soutenu par une levée de fonds de EUR200mn ($216mn) auprès de Bpifrance et du groupe Crédit Agricole, le producteur dispose des moyens financiers pour intégrer ce portefeuille de grande taille.
L’opération renforce également la tendance actuelle du marché à la renationalisation partielle des infrastructures énergétiques, avec des actifs détenus de plus en plus par des producteurs nationaux soutenus par du capital public ou mutualiste. Cette évolution facilite notamment l’accès à des financements verts territorialisés.
Enjeux réglementaires et sociaux
Le transfert d’actifs reste conditionné à la consultation du Comité Social et Économique (CSE) d’Iberdrola France, conformément aux dispositions du Code du travail. Cette procédure pourrait, en cas de contestation, décaler la finalisation de l’opération mais n’entraîne généralement pas son annulation.
Sur le plan de la concurrence, les autorités ne prévoient pas de contrôle approfondi compte tenu de la taille modeste de l’opération à l’échelle du marché. Toutefois, la mutation de la propriété implique des adaptations contractuelles, notamment dans les contrats d’achat d’électricité (PPA) ou les conventions de raccordement avec le gestionnaire du réseau.
Effets attendus sur le marché
Les actifs repris restent marginaux pour le mix électrique français mais stratégiques pour les appels d’offres de la Commission de régulation de l’énergie (CRE) et pour la sécurisation des revenus via PPA. La bascule de propriété pourrait conduire à une renégociation de certaines conditions contractuelles, notamment avec des contreparties industrielles.
Le changement de propriétaire entraîne également une réorganisation des relations avec les sous-traitants en charge de la maintenance, du génie civil ou des raccordements, certains contrats devant être adaptés aux standards de Technique Solaire. Cette transition pourrait favoriser une plus grande stabilité des investissements locaux.
Recentrage stratégique d’Iberdrola
En se délestant de ses actifs terrestres français, Iberdrola libère des ressources destinées à des investissements jugés plus rentables, notamment dans les réseaux britanniques et américains ou dans des projets offshore. Le maintien du parc de Saint-Brieuc permet au groupe de conserver une position structurante sur le marché français tout en limitant son exposition aux contraintes spécifiques du segment onshore.