La mission d’examen des Services intégrés d’évaluation réglementaire (Integrated Regulatory Review Service, IRRS) de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) s’est achevée le 11 juillet, après 12 jours d’audit auprès du ministère chinois de l’Écologie et de l’Environnement, qui abrite l’Administration nationale de sûreté nucléaire (NNSA). L’équipe de 24 experts estime que la capacité de supervision devra suivre le rythme d’un parc en forte expansion. Les inspecteurs saluent une organisation éprouvée mais jugent ses effectifs insuffisants pour couvrir l’ensemble du cycle du combustible. Ils recommandent que Pékin élabore rapidement un plan de recrutement pluriannuel.
Des effectifs sous pression
La Chine exploite actuellement 59 réacteurs qui assurent environ cinq % de sa production d’électricité, construisant simultanément 32 unités supplémentaires et en projetant 21 autres. Selon le rapport intermédiaire, chaque tranche en fonctionnement nécessite au moins six inspecteurs dédiés, un ratio qui deviendra intenable sans renfort. L’IRRS souligne aussi l’importance d’harmoniser les guides techniques de la NNSA avec les plus récents standards de l’AIEA, notamment sur l’intelligence artificielle appliquée à la sûreté. Le manque de processus formalisé pour la planification des inspections figure parmi les neuf recommandations prioritaires.
Les examinateurs ont passé en revue la gouvernance, l’autorisation, l’inspection, la préparation aux urgences et la gestion des déchets radioactifs. Ils ont relevé comme bonne pratique la surveillance systématique de la culture de sûreté à travers des indicateurs numériques, mais estiment que le dispositif reste perfectible sans programme d’évaluation indépendant. Ils préconisent d’établir un calendrier clair pour mettre à jour les textes réglementaires afin d’aligner l’ensemble des règles nationales sur les standards publiés le 10 février et le 5 septembre. Un suivi périodique par mission IRRS de courte durée est également encouragé.
Des chantiers en série
Le calendrier d’expansion du nucléaire civil est tiré par la volonté officielle de réduire la dépendance au charbon tout en soutenant la croissance industrielle. Les réacteurs de troisième génération signés China National Nuclear Corporation et China General Nuclear Power Group mobilisent un carnet de commandes évalué à $34.3bn sur la période 2025-2030. Les investisseurs étrangers apprécient la visibilité offerte par un prix administré du kilowatt-heure, mais exigent une surveillance indépendante jugée garante de leur exposition au risque. L’AIEA estime que chaque gigawatt installé crée plus de 3,000 emplois directs dans la filière équipementière.
« Le développement fulgurant du programme chinois imposera de former un nombre significatif de professionnels supplémentaires dans la régulation au cours des cinq prochaines années », a déclaré Mark Foy, ancien directeur général et inspecteur en chef de l’Office for Nuclear Regulation du Royaume-Uni, qui conduisait la mission. Selon lui, l’utilisation d’outils numériques par la NNSA constitue « un exemple dont chacun peut s’inspirer ». Les experts soulignent toutefois que la rétention des compétences reste un défi, la concurrence du secteur privé attirant les ingénieurs les plus expérimentés. Ils invitent le gouvernement à détailler des incitations de carrière pour stabiliser les équipes d’inspection.
Un rapport attendu
Le rapport final sera transmis aux autorités dans environ trois mois et devrait être rendu public sans restriction, selon le ministère. Pékin envisage de solliciter une nouvelle mission de suivi une fois les recommandations mises en œuvre. Baotong Dong, vice-ministre de l’Écologie et de l’Environnement et administrateur de la NNSA, a déclaré que la Chine « accélérera la construction d’un système de régulation moderne afin d’assurer un cycle vertueux entre sûreté élevée et développement de haute qualité ». L’étendue de la publication permettra aux bailleurs de fonds internationaux d’évaluer plus finement les exigences de conformité.