Alors que la voiture à hydrogène pourrait contribuer à décarboner nos économies et présente l’avantage d’être rechargeable en quelques minutes, son développement se fait attendre. L’hydrogène peut être extrait en grande quantité, notamment par électrolyse. La France lance son plan Hydrogène accompagné d’un budget de €7,2 milliards sur dix ans.
Des promesses politiques
En octobre 2021, lors d’une présentation de France 2030, le Président Macron fixe l’objectif pour la France de devenir le leader de l’hydrogène renouvelable en 2030. Cela passerait notamment par la création d’au moins deux gigafactories d’électrolyseurs sur le territoire. Elisabeth Borne annonce depuis la construction de 10 gigafactories.
Au sein de cette stratégie de développement de l’hydrogène, la mobilité n’est pas en reste. Au niveau de l’Union Européenne, les véhicules à hydrogène visent à remplir deux fonctions. Tout d’abord décarboner le secteur de la mobilité, mais également réduire la dépendance aux combustibles fossiles, notamment russes.
À l’échelle européenne et française, les véhicules lourds et les utilitaires sont les principales cibles pour le développement de l’hydrogène dans les politiques de mobilité. Toutefois dans l’hexagone, les particuliers bénéficient du bonus écologique pour l’achat d’un véhicule à hydrogène. Si l’Europe se concentre sur les véhicules utilitaires et les véhicules lourds, ce n’est pas le cas de la Chine.
Le gouvernement chinois soutient massivement le développement des véhicules à hydrogène. Le marché n’en est toutefois qu’à ses balbutiements et manque actuellement d’infrastructures. Cependant, le gouvernement chinois prévoit une forte augmentation du nombre de véhicule à pile à combustion en circulation dans les années à venir.
Un marché en développement
Hyundai et Toyota constituent actuellement les principaux acteurs sur le marché de la voiture à hydrogène. L’autonomie de ces voitures est supérieure à 500 kilomètres et le plein peut être fait très rapidement. C’est un des principaux avantages par rapport aux véhicules électriques.
Le développement des voitures avec pile à combustion reste modeste, bien qu’en croissance. Selon les chiffres de JATO dynamics, environ 15.500 véhicules de ce type se vendaient en 2021. Cela représente une hausse de 84% par rapport à 2020. Parmi ces ventes, le Hyundai Nexo et la Toyota Mirai dominent très largement le marché.
Daimler et Honda tentent d’entrer sur le marché de l’hydrogène. Ils renoncent finalement à la commercialisation de leurs véhicules individuels en 2020 et 2021. Les deux constructeurs constatent un manque de vente.
Le développement de ce marché s’accélérera certainement dans le futur. En effet, BMW et Kia ambitionnent de développer une gamme de véhicule à hydrogène d’ici 2028. En outre, la réglementation accompagne ce développement.
Des freins au développement du véhicule individuel
Les eurodéputés adoptaient en octobre 2022 des règles visant à stimuler le déploiement de stations de recharge hydrogène et électrique. L’objectif fixé est la mise en place de stations de ravitaillement en hydrogène tous les 100 km le long des principaux axes. En outre, cette mesure devrait entrer en action d’ d’ici 2028.
Alors que les déclarations politiques en faveur de la voiture à hydrogène se multiplient, Nathalie Schmitt, directrice scientifique R&D Europe d’Air Liquide, semble tempérer cet enthousiasme. Au cours d’une intervention au colloque « Demain, les transports » au Collège de France, elle déclare :
« La voiture à hydrogène ne sera pas la voiture de Monsieur et Madame tout le monde, en termes d’usage la batterie est bien plus intéressante. »
Dans un rapport intitulé « Net-Zero America », des chercheurs de l’université Princeton montrent que les rendements sont meilleurs avec une voiture électrique qu’une voiture à hydrogène. Avec un véhicule électrique, le pourcentage d’énergie délivré aux roues est de 81%. Tandis que dans le cas de la voiture à hydrogène, ce n’est que 49%.
Ainsi, en termes de rendements, la voiture électrique à batterie serait plus efficiente que celle intégrant une pile à combustible. En outre, malgré les perspectives de développement de gigafactories d’électrolyseurs, la France consomme toujours une quantité importante d’hydrogène non décarboné. En 2021, cette consommation s’élève à 900.000 tonnes.
L’hydrogène plus adapté pour d’autres mobilités
Cédric Philibert, ancien employé de l’Agence Internationale de l’Energie déclare:
« Mon inquiétude, c’est qu’on veuille utiliser l’hydrogène pour faire tout et n’importe quoi. »
Selon lui, l’utilisation de l’hydrogène pour les voitures individuelles ne devrait pas être prioritaire. De meilleurs usages semblent en effet possibles, notamment dans le secteur de la mobilité.
Tout d’abord, sur les véhicules lourds, tels que les camions, la batterie sera compliquée à mettre en place, compte tenu de la puissance nécessaire. L’hydrogène peut donc représenter une solution pour ce type de véhicule. La Chine dispose déjà d’environ 1000 camions à hydrogène en circulation.
D’autre part, l’hydrogène présente un intérêt pour le secteur ferroviaire, et particulièrement pour les portions de lignes difficiles à électrifier. La SNCF prévoit d’abandonner le diesel d’ici 2035, et la Deutsche Bahn en 2040. Cependant, environ 46% du réseau ferroviaire européen ne bénéficie pas d’une électrification.
L’électrification représentant un coût non négligeable, les locomotives hydrogène, telles que celles développées par Alstom, peuvent représenter une alternative simple et moins onéreuse. Enfin, l’Organisation maritime internationale vise à réduire les émissions de CO2 de 50% d’ici à 2050. L’hydrogène est particulièrement adapté aux navires avec un besoin limité d’autonomie et des trajets fixes.