Malgré une période estivale marquée par des efforts pour augmenter ses stocks de gaz, l’Ukraine se trouve actuellement en deçà de l’objectif fixé pour novembre. Avec 12,5 milliards de mètres cubes (Bcm) en réserve, contre une cible de 13,2 Bcm, les réserves énergétiques sont en baisse par rapport aux années précédentes. En 2023, le pays avait atteint 16 Bcm à la même époque, notamment grâce aux injections de gaz effectuées par des traders européens. Cependant, les récentes attaques sur les infrastructures de stockage, combinées à un manque d’attractivité économique de l’entreposage en 2024, ont freiné ces apports.
Contexte énergétique et sécurité nationale
La question de la sécurité énergétique en Ukraine prend une importance particulière avec l’arrivée de la saison froide. Selon le président de Naftogaz, Oleksiy Chernyshov, la gestion rationnelle de l’énergie est un impératif national pour passer l’hiver dans des conditions sûres. Il appelle chaque collectivité à adopter des pratiques énergétiques plus efficaces, soulignant que l’enjeu dépasse les simples économies d’énergie pour toucher à la question de l’indépendance énergétique du pays.
L’offensive de la Russie sur le sol ukrainien a poussé les autorités à se concentrer sur les capacités de production nationale. En 2024, la production nationale de gaz devrait de nouveau augmenter, suivant la tendance de 2023, où celle-ci avait atteint 18,7 Bcm, contre 18,5 Bcm en 2022. La société publique UkrGazVydobuvannya a été un acteur clé dans ces efforts d’augmentation.
Des réserves pour la production d’électricité
Malgré la faiblesse relative des stocks de gaz, l’Ukraine dispose de réserves de diesel, d’essence et de gaz pour alimenter les générateurs électriques de secours. Selon le vice-ministre de l’énergie, Mykola Kolisnyk, ces approvisionnements visent à assurer la stabilité du réseau pendant la saison de chauffage. Une quantité significative de générateurs à diesel et à essence a également été importée pour pallier les éventuelles interruptions de l’approvisionnement énergétique.
L’Agence Internationale de l’Énergie (AIE) avait recommandé que l’Ukraine importe 0,6 Bcm supplémentaire de gaz pour atteindre son objectif de stockage. Le financement de ces importations, estimé à 250 millions d’euros, pourrait néanmoins poser problème. En cas de températures hivernales inférieures à la moyenne, la demande en gaz pourrait augmenter de 25 % par rapport aux niveaux de l’année précédente, mettant encore plus sous pression les infrastructures de stockage.
Des incertitudes pour l’avenir
La situation actuelle pourrait être exacerbée par la fin des flux de gaz transitant par l’Ukraine en provenance de Russie, prévue en janvier 2025. La fin de l’accord de transit gazier entre l’Ukraine et la Russie nécessiterait une adaptation de l’approvisionnement en provenance d’Europe centrale et orientale, ce qui impliquerait des coûts supplémentaires liés aux tarifs de transmission.
L’Ukraine pourrait alors se retrouver dans l’obligation de dépendre plus largement des réserves stockées sur son territoire. Cependant, les infrastructures de stockage demeurent vulnérables aux attaques, comme l’ont montré les frappes de missiles et de drones russes survenues plus tôt dans l’année.
Stratégies pour une indépendance énergétique durable
Pour renforcer la résilience énergétique du pays, les autorités ukrainiennes misent sur l’augmentation de la production de gaz domestique. La réduction de la dépendance aux importations reste une priorité, en raison du coût élevé du gaz sur les marchés européens et de la volatilité des prix. Cette stratégie répond non seulement à des impératifs économiques, mais également à des objectifs stratégiques, dans un contexte où la sécurité énergétique s’impose comme un élément clé de l’indépendance ukrainienne face aux pressions russes.
Bien que l’Ukraine puisse, en théorie, compter sur ses capacités de stockage et de production pour couvrir ses besoins cet hiver, une vague de froid intense pourrait néanmoins compliquer cet équilibre fragile. L’adaptation des infrastructures, la gestion des approvisionnements et la capacité de l’Ukraine à mobiliser des financements internationaux seront des facteurs déterminants pour sécuriser l’approvisionnement énergétique du pays dans les mois à venir.