Le président du Conseil européen, Charles Michel, s’est exprimé le 6 avril au sujet de la crise entre l’Ukraine et la Russie. Il a déclaré que l’Union européenne allait devoir prendre des mesures concernant les importations de gaz russe.
La Commission Européenne s’est engagée
La Commission Européenne (CE) a récemment fait part de son intention de réduire fortement la demande de gaz russe dans l’Union européenne. Elle souhaite la réduire de deux tiers d’ici à la fin de l’année. Toutefois, les acheteurs européens sous contrat, pour la plupart des sociétés privées, se sont engagés à poursuivre leurs achats.
De plus, la CE s’est également engagée à éliminer complètement les importations de gaz russe d’ici 2022. Cependant de nombreuses voix s’élèvent pour demander à Bruxelles de prendre des mesures plus immédiates. Le 5 avril, la CE a proposé d’interdire les importations de charbon russe à partir des ports de l’UE. Elle a également déclaré travailler à la réduction des exportations de pétrole russe.
M. Michel s’exprime à ce sujet :
« Le nouveau paquet comprend une interdiction des importations de charbon. Et je pense que des mesures sur le pétrole, et même le gaz, seront également nécessaires tôt ou tard ».
Une interdiction complexe à mettre en place
Il apparaît ainsi particulièrement compliqué de réduire la dépendance à l’égard du gaz russe. Les importations en provenance de Russie couvrent en effet 40 % de la demande en gaz de l’UE. Cela représente quelque 155 milliards de m3 de gaz russe en 2021.
La société française TotalEnergies a mis le doigt sur ce problème dans une déclaration exposant ses principes de conduite à l’égard de la Russie :
« Contrairement à ce qui se passe pour le pétrole, il apparaît que les capacités logistiques de l’Europe en matière de gaz ne permettent pas de s’abstenir d’importer du gaz russe au cours des deux ou trois prochaines années sans que cela ait un impact sur l’approvisionnement énergétique du continent. »
Des revenus russes élevés grâce aux importations de l’UE
En dépit de la difficulté de mise en place d’une mesure d’interdiction des importations de gaz russe, celle-ci semble indispensable. En effet, les prix du gaz en Europe sont relativement élevés. Or, c’est Gazprom, contrôlé par l’État russe, qui fournit une grande partie du gaz russe sur le territoire européen.
Les contrats de Gazprom prévoient généralement un délai de six à neuf mois avant le paiement. Cela permet, selon Gazprom, d’améliorer la visibilité financière. Gazprom a envoyé quelque 343 millions de m³/j de gaz russe dans l’UE le 3 avril, selon les données les plus récentes.
Cela signifie que les pays européens poursuivent les paiements à Gazprom. Josep Borrell, responsable des affaires étrangères de l’UE, a souligné les implications de la poursuite de ces paiements. Il a déclaré que l’UE s’était engagée à verser 1 milliard d’euros à l’Ukraine. Il met ce chiffre en perspective avec la dépense européenne énergétique :
« Cela peut sembler beaucoup, mais ce milliard d’euros est ce que nous payons chaque jour à Poutine pour l’énergie qu’il nous fournit. Depuis le début de la guerre, nous leur avons donné 35 milliards d’euros, alors que nous avons donné 1 milliard d’euros pour armer les Ukrainiens. Cette différence gigantesque devrait également mettre en évidence la nécessité de mettre en pratique ce que le Conseil européen nous a ordonné de faire : réduire la dépendance énergétique. Et, en cela, la Commission exercera sans aucun doute son leadership, en proposant les actions nécessaires à cet effet ».
Quel impact sur les prix du gaz dans l’Union européenne ?
Un haut fonctionnaire de la CE a reconnu le 6 avril que l’élimination progressive du gaz russe aurait un impact sur les prix. Il en est effet indéniable que cette mesure ne permettra pas de réguler les prix du gaz en Europe. Bien au contraire, elle aura l’effet inverse et les consommateurs européens doivent s’y attendre.
Tatiana Marquez Uriarte, membre du cabinet du commissaire européen à l’énergie Kadri Simson, s’exprime à ce sujet :
« En raison de notre nouvel objectif géopolitique et stratégique de ne pas être dépendant des combustibles fossiles russes, il y aura évidemment un impact sur les prix ».
En effet, cette probable interdiction se manifeste dans un contexte de lutte contre le réchauffement climatique. Le gaz est un élément essentiel de la transition énergétique. Jusqu’à peu, l’Union européenne parlait par ailleurs de « pont gazier ». Ce terme désignait l’utilisation du gaz comme une ressource transitoire, permettant de développer l’industrie de l’énergie renouvelable. Ce plan semble donc complexe à maintenir en cas de décision radicale vis-à-vis des importations de gaz russe.