Les Vingt-Sept se sont mis d’accord lundi sur des objectifs contraignants pour réduire leur consommation d’énergie. Ils ont aussi trouver un compromis pour accélérer l’essor des renouvelables. Néanmoins, ils ont reporté à plus tard les ajustements jugés nécessaires pour mettre fin à leur dépendance vis-à-vis de la Russie.
Réunis au Luxembourg, les ministres de l’Energie se sont prononcé sur deux volets du plan climatique dévoilé en juillet 2021 par la Commission européenne. Il vise à réduire de 55% les émissions de gaz à effet de serre de l’UE par rapport à 1990.
Premier levier: un objectif contraignant de 40% de renouvelables dans le bouquet énergétique européen d’ici à 2030, contre une cible actuelle de 32%.
Les ministres ont repris les chiffres proposés l’an dernier, mais négocié âprement les modalités, en vue des discussions avec le Parlement européen.
Chaque Etat devrait ainsi soit réduire de 13% l’intensité des gaz à effet de serre dans les transports, soit atteindre 29% d’énergies renouvelables dans la consommation d’énergie du secteur. Les biocarburants devront représenter d’ici la fin de la décennie 4,4% des énergies renouvelables fournies aux transports.
Enfin, les Vingt-Sept devront gonfler la part des renouvelables dans l’énergie pour le chauffage et le refroidissement. Tout cela, avec une augmentation d’au moins 0,8% par an jusqu’en 2026 et de 1,1%. Ensuite, avec l’objectif, indicatif, de 49% d’énergies renouvelables dans les bâtiments d’ici 2030.
Dans l’industrie, l’objectif d’une augmentation annuelle de 1,1% de l’utilisation d’énergies renouvelables reste indicatif.
Surtout, les ministres prônent des procédures d’autorisation “accélérées” pour les projets solaires ou éoliens. Ils souhaitent aussi un allègement des contraintes administratives réclamé le mois dernier par Bruxelles dans sa feuille de route “REPowerEU”.
Dans ce plan, élaboré pour réduire davantage la dépendance aux hydrocarbures russes, la Commission proposait aussi de relever à 45% le niveau des renouvelables dans l’UE à horizon 2030.
Or, les ministres n’ont pas repris à leur compte cette nouvelle ambition, arguant d’un “délai trop court”.
Procédures “accélérées”
“Nous engrangeons ce qui peut l’être immédiatement, nous continuerons à relever nos ambitions” lors des négociations avec les eurodéputés, a observé la ministre française de la Transition énergétique Agnès Pannier-Runacher.
De même, pour la consommation d’énergie, les ministres ont gardé l’objectif proposé par la Commission en juillet 2021, soit une réduction de 9% d’ici 2030 par rapport à 2020.
L’objectif arrêté correspond à une consommation finale maximale de 787 millions de tonnes équivalent pétrole (Mtep) par an, en baisse de 36% par rapport aux projections pour 2030.
Chaque pays établira des contributions nationales que la Commission corrigera si nécessaire. Mme Pannier-Runacher a réfuté tout affaiblissement des ambitions.
“Les cibles de consommation d’énergie finale sont gravées dans le marbre, c’est ce qui compte (…) et un certain nombre de flexibilités sont introduites car chaque Etat ne part pas du même point”, a-t-elle fait valoir.
L’Espagne a obtenu gain de cause. Le texte propose de rendre“indicatif”, et non plus obligatoire, l’objectif de consommation primaire.
Cela pourrait encourager le développement de l’hydrogène, dont la production est très énergivore. Cela pourrait aussi limiter les efforts pour rendre plus efficaces les centrales thermiques ou nucléaires.
Soucieux d’éviter une “échappatoire”, Berlin a fait passer un amendement. Ce dernier impose aux Etats de transmettre impérativement leurs contributions sur leur consommation finale. Cette dernière est la seule faisant l’objet d’un objectif européen contraignant.
Le texte impose la rénovation d’au moins 3% chaque année de la surface totale des bâtiments publics. En outre il impose la transparence sur la consommation des centres de données informatiques, très énergivores.
Certains pays ont exprimé leurs préoccupations sur l’ensemble du texte: “Comment faire si vous êtes déjà presque au maximum? La seule façon d’atteindre notre objectif, c’est de fermer des industries”, s’est indigné le
ministre luxembourgeois Claude Turmes, appelant à “ne pas pénaliser les Etats ayant déjà une politique ambitieuse”.
La Pologne, elle, juge “extrêmement élevé et disproportionné” l’objectif qui lui incomberait. Le pays estime qu’il ignore “sa situation géopolitique” due à la guerre en Ukraine et à l’impact des réfugiés qu’elle accueille.