TotalEnergies et Chevron annoncent leur retrait de Birmanie où ils étaient partenaires dans le champ gazier de Yadana. Cette décision fait suite à une demande pressante des ONG de défense des droits humains à la suite du coup d’Etat militaire.
TotalEnergies se retire du gaz birman
Néanmoins, les entreprises étrangères ayant quitté la Birmanie restent rares malgré l’appel des ONG face à la répression sanglante de la contestation et les avertissements d’analystes qui évoquent un environnement « toxique » pour les investissements.
« Le contexte qui ne cesse de se dégrader au Myanmar, en matière de droits humains (…) nous a conduits à réévaluer la situation et ne permet plus à TotalEnergies d’apporter une contribution positive suffisante dans ce pays », explique le groupe français dans un communiqué.
Chevron lui emboîte le pas :
« Nous avons réévalué notre intérêt pour le projet de gaz naturel de Yadana afin de permettre une transition planifiée et ordonnée qui conduira à un retrait du pays », déclare un porte-parole de la major américaine, Cameron Van Ast.
Le processus de retrait « prévu aux contrats du champ de Yadana et de la société de transport MGTC au Myanmar » a été initié « sans aucune contrepartie financière pour TotalEnergies », précise le géant français.
Retrait effectif dans 6 mois
Le retrait sera effectif dans six mois et les intérêts de TotalEnergies et les opérations du champ seront répartis entre les partenaires restant.
TotalEnergies est partenaire (31,24%) et opérateur du champ de Yadana (blocs M5 et M6) aux côtés des Américains Unocal-Chevron (28,26%), de PTTEP (25,5%), filiale de la société nationale d’énergie thaïlandaise, et de la société d’État birmane MOGE (15%), contrôlée par l’armée.
Cette décision « reflète à quel point la Birmanie est devenue toxique comme environnement pour investir », commente auprès de l’AFP Richard Horsey, de l’International Crisis Group.
Mais l’absence de compensation financière pour le groupe français implique que « les autres partenaires, dont le régime, auront une rentrée d’argent sous la forme d’une part plus importante dans le projet », met-il en garde.
Après Telenor et Voltalia
Quelques rares entreprises étrangères avaient déjà plié bagage, dont le groupe de télécoms norvégien Telenor et le producteur français d’énergies renouvelables Voltalia. D’autres, comme EDF, avaient suspendu leur activité ou leurs commandes (H&M, Benetton).
TotalEnergies avait déjà mis fin au projet de développement d’un nouveau gisement, arrêté ses campagnes de forage et suspendu des versements aux actionnaires d’un gazoduc, dont une entreprise contrôlée par l’armée birmane.
Le groupe français avait versé environ $230 millions aux autorités birmanes en 2019, puis environ 176 millions en 2020, sous forme de taxes et « droits à la production ».
6 milliards de m3 de gaz par an
Le champ de Yadana produit environ 6 milliards de mètres cubes par an de gaz, dont 70% environ est exporté en Thaïlande et 30% fournis à la société birmane MOGE pour le marché domestique.
TotalEnergies invoquait jusque-là l’impossibilité de « priver les Birmans et les Thaïlandais d’électricité » et s’était engagé en contrepartie des taxes versées à l’Etat birman à financer des ONG de défense des droits humains dans le pays pour le même montant.
Dans une lettre adressée plus tôt cette semaine à Human Rights Watch, le PDG de TotalEnergies Patrick Pouyanné a affirmé qu’il « n’existe aucun flux financier entre TotalEnergies et MOGE ». « Le gaz domestique est livré à MOGE et enregistré comme payé en nature par TotalEnergies et fait l’objet d’une compensation sur les revenus export », explique-t-il.