Le procès de l’une des plus vastes affaires de criminalité environnementale en Suède s’est conclu avec des réquisitions de peines de prison ferme contre les anciens dirigeants de Think Pink. L’entreprise est soupçonnée d’avoir stocké ou abandonné illégalement des déchets industriels sur 21 sites du pays, sans procéder à leur traitement comme prévu dans les contrats avec ses clients.
Une activité centrée sur la collecte de déchets non triés
Think Pink proposait des services de recyclage à des clients variés, notamment des municipalités, des copropriétés et des entreprises du BTP. L’offre couvrait le traitement de matériaux aussi divers que les déchets de construction, équipements électroniques, jouets, plastiques ou pneus. Cependant, selon les éléments de l’accusation, aucun tri n’aurait été effectué, les déchets ayant été entreposés à l’air libre, parfois à proximité de zones naturelles protégées.
Le parquet affirme que cette stratégie aurait permis à l’entreprise de réaliser d’importantes économies, en évitant les coûts liés à la décontamination ou au recyclage réglementaire. Le procureur Anders Gustafsson a estimé que « l’objectif était purement financier », rappelant qu’un traitement conforme à la loi aurait fortement réduit les marges du groupe.
Cinq accusés et plus de 45 000 pages de preuves
Cinq personnes sont visées dans ce dossier, dont Bella Nilsson, ancienne dirigeante de Think Pink, aujourd’hui connue sous le nom de Fariba Vancor. Surnommée par la presse « la reine des ordures », elle a rejeté toute responsabilité, déclarant à la barre : « Nous avons tout fait correctement, légalement. » Le ministère public a également requis six ans de prison contre son ex-mari Thomas Nilsson, cofondateur de l’entreprise, ainsi que Leif-Ivan Karlsson, entrepreneur médiatisé ayant dirigé brièvement Think Pink.
Deux autres partenaires, le courtier Robert Silversten et l’organisateur logistique Tobias Gustafsson, encourent la même peine. Tous ont nié les faits. Le procès, ouvert en septembre 2024 après une enquête de plusieurs années, s’appuie sur un dossier de plus de 45 000 pages.
Des impacts environnementaux chiffrés et contestés
Parmi les substances identifiées sur les sites figurent du plomb, du mercure, de l’arsenic, ainsi que des polychlorobiphényles (PCB), des produits classés comme polluants persistants. L’accusation a évoqué des risques graves pour la santé humaine, animale et végétale, sans pour autant fournir d’évaluation chiffrée indépendante de l’impact sanitaire.
Plusieurs communes affectées réclament des réparations financières. Le conseil municipal de Botkyrka, situé au sud de Stockholm, a réclamé des compensations pour la gestion de deux incendies spontanés survenus en 2020 et 2021 sur des sites de stockage illégal. Les feux ont duré plusieurs mois et ont nécessité des opérations de décontamination à proximité de réserves naturelles.
Une facture estimée à 260 millions de couronnes
Les demandes d’indemnisation s’élèvent à 260 millions de couronnes suédoises (23 millions d’euros, $24.7mn), essentiellement pour couvrir les frais de nettoyage et de remise en état des sols. La décision finale du tribunal est attendue pour le 17 juin. Aucune information n’a été donnée concernant d’éventuelles poursuites contre les clients de Think Pink ayant sous-traité la gestion de leurs déchets.