Shell a confirmé son retrait de deux projets majeurs d’éolien flottant en Écosse dans le cadre d’une révision stratégique de ses engagements. Le groupe a cédé sa participation de 50 % dans MarramWind à son partenaire ScottishPower Renewables, filiale du groupe espagnol Iberdrola, qui devient ainsi seul développeur du projet estimé à 3 GW. Parallèlement, Shell restitue au gestionnaire du domaine maritime Crown Estate Scotland la concession de CampionWind, d’une capacité de 2 GW, désormais en attente de réattribution.
Un repositionnement vers des activités à génération de trésorerie rapide
Cette décision traduit la volonté du groupe d’alléger ses futurs engagements d’investissement dans des projets longs et complexes, au profit de segments jugés plus compétitifs comme le gaz naturel liquéfié (LNG), le négoce d’énergie ou encore le power trading. Le retrait de Shell reflète également des contraintes structurelles propres à l’éolien flottant au Royaume-Uni : coûts d’installation élevés, incertitudes sur les délais de raccordement et visibilité limitée sur les conditions du prochain appel d’offres CfD (Contract for Difference) prévu en 2025.
ScottishPower renforce son rôle, Crown Estate relance CampionWind
ScottishPower Renewables confirme la poursuite de MarramWind en reprenant l’intégralité du projet, sécurisant ainsi la continuité du développement. CampionWind, en revanche, revient dans le portefeuille de Crown Estate Scotland, qui devra soit relancer le site auprès de nouveaux développeurs, soit le suspendre. Cette évolution modifie la composition du programme écossais ScotWind, tout en testant la capacité du marché à répondre aux exigences techniques, industrielles et contractuelles des projets flottants.
Un cadre contractuel renforcé, mais encore incertain
Le Royaume-Uni a revu les conditions du mécanisme CfD pour les appels d’offres à venir : les prix plafonds (Administrative Strike Prices) ont été relevés et les contrats proposés couvrent désormais vingt ans avec une indexation sur l’inflation (CPI). Néanmoins, ces ajustements n’apportent pas une visibilité suffisante selon les standards de Shell, qui maintient un seuil élevé de retour sur investissement interne pour ses projets, notamment face à ses alternatives dans le LNG et la flexibilité énergétique.
Conséquences sur l’écosystème industriel écossais
Le maintien de MarramWind représente un soutien partiel à la chaîne d’approvisionnement locale, mais la sortie de CampionWind supprime un volume de 2 GW du pipeline régional à court terme. Cette réduction de la charge de travail pourrait ralentir les investissements dans les infrastructures industrielles nécessaires à la compétitivité de l’éolien flottant, tels que les flotteurs, les câbles dynamiques et les installations portuaires.
Shell poursuit une stratégie d’allocation disciplinée
En allégeant son exposition aux projets à forte intensité capitalistique et à cycles longs, Shell s’aligne sur son objectif de capex annualisé de 20 à 22 G$ sur la période 2025-2028. Le portefeuille renouvelable devient ainsi plus axé sur les modèles “asset-light”, intégrant davantage d’activités commerciales, de flexibilité réseau et de distribution. Ce recentrage est cohérent avec sa stratégie “value over volume” visant à maximiser la rentabilité sans nécessairement augmenter la production physique d’énergie.
Peu d’impact immédiat sur le marché, mais des incertitudes à moyen terme
Le retrait des deux projets intervient en amont de la décision finale d’investissement (FID), ce qui limite son impact immédiat sur le marché britannique de l’électricité. Toutefois, la perte de CampionWind réduit les perspectives d’ajout de capacités dans la région à moyen terme. Les prochaines étapes critiques incluent la décision de Crown Estate sur l’avenir de CampionWind, les résultats de l’AR7 et l’évolution du calendrier de raccordement, encadré par le gestionnaire de réseau ESO (Electricity System Operator).