Shell UK Ltd a conclu un accord avec Ithaca Energy plc pour lui céder 50 % des licences P2629 et P2630, qui incluent la découverte gazière Tobermory située dans le sous-bassin Northern Flett, au large des îles Shetland. Shell conserve le rôle d’opérateur ainsi que la moitié de l’intérêt économique, consolidant un partenariat déjà existant sur Tornado, un autre projet gazier dans la même zone géographique. L’accord intervient alors que la fiscalité sur les profits pétroliers et gaziers atteint un taux effectif de 78 % au Royaume-Uni.
Un cluster gazier sous contrainte fiscale
Tobermory rejoint un cluster stratégique d’actifs non encore développés West of Shetland, incluant Tornado, Rosebank et Cambo, où Ithaca est déjà présent à divers degrés d’opération. Ce regroupement d’actifs permet des synergies techniques et logistiques, notamment via un potentiel raccordement commun au Shetland Gas Plant. Le cadre fiscal actuel, marqué par l’Energy Profits Levy (EPL), constitue une contrainte majeure, mais les mécanismes d’“investment allowance” encouragent paradoxalement l’investissement en capital sur des actifs déjà licenciés.
La transaction permet à Shell de réduire son exposition capitalistique sur un projet encore loin de la décision finale d’investissement (FID) sans renoncer à l’initiative technique. Cette logique de partage du risque, combinée à un maintien de l’opération, illustre une stratégie de portefeuille visant à concentrer le capital sur des projets à retour plus rapide comme Victory, tout en conservant des leviers d’influence sur des actifs à horizon plus long.
Risque politique, arbitrage technique et trajectoire sectorielle
La zone West of Shetland reste soumise à une pression réglementaire croissante, avec plusieurs projets contestés juridiquement, notamment Jackdaw et Rosebank. Chaque nouvelle étape de développement est susceptible de déclencher un contentieux, ce qui justifie pour Shell un modèle d’“asset-light operatorship”. De son côté, Ithaca accepte une concentration géographique et politique accrue de son portefeuille en échange d’un potentiel de croissance contrôlé.
Le gouvernement britannique maintient une politique de réduction des nouveaux permis tout en cherchant à sécuriser l’approvisionnement gazier national. Ce positionnement crée un équilibre instable entre objectifs climatiques et sécurité énergétique. L’accord entre Shell et Ithaca alimente ce débat, offrant un signal aux autorités sur la nécessité d’une fiscalité plus stable pour préserver les investissements futurs sur le plateau continental britannique (UKCS).
Conséquences pour la chaîne de valeur locale
L’opération contribue à maintenir une charge de travail potentielle pour la chaîne logistique d’Aberdeen et des Shetland, en particulier dans l’ingénierie subsea et les services FPSO (Floating Production Storage and Offloading). Le maintien de Shell comme opérateur rassure les fournisseurs sur la continuité des standards industriels et la fiabilité des paiements, éléments critiques dans un contexte où plusieurs projets ont été suspendus à cause de la pression fiscale.
Ithaca renforce ainsi sa position comme acteur intermédiaire de la mer du Nord, capable de reprendre des participations sur des projets complexes ou à maturité incertaine. Cette stratégie, déjà observée avec Cambo et Rosebank, semble s’inscrire dans un modèle reproductible, centré sur des partenariats avec des majors en phase de rationalisation de portefeuille.