Les sanctions économiques imposées par les États-Unis et l’Union européenne (UE) contre le gaz naturel liquéfié (GNL) russe ont encouragé la création de nouveaux canaux d’échange hors du système financier traditionnel. Face aux contraintes réglementaires, des hubs commerciaux en Asie et au Moyen-Orient émergent pour soutenir un marché parallèle d’échanges, échappant ainsi à la surveillance occidentale.
Un écosystème commercial en pleine croissance
Des centres comme Mumbai, Dubaï et Hong Kong jouent un rôle central dans ce marché parallèle, facilitant les transactions de GNL en monnaies locales telles que le yuan. Ces hubs permettent à des compagnies de pays sous sanctions, notamment la Russie et l’Iran, de créer des comptes séquestres pour recevoir des paiements, souvent sous forme de troc ou de biens manufacturés. Alexey Eremenko, directeur associé de Global Risk Analysis chez Control Risks, explique que cette tendance rappelle des réseaux de contrebande plus anciens, mais adaptés aux besoins modernes du commerce énergétique.
Ce réseau d’évasion s’inspire de modèles similaires dans le commerce pétrolier, où des opérations de mélange et de réétiquetage de produits ont permis de contourner les restrictions. En Iran, en Indonésie et en Malaisie, des ports en eaux profondes servent de points de transit pour ces opérations, offrant une couverture efficace face aux contrôles réglementaires.
Régulation et limitations des capacités de sanctions
Les autorités américaines et européennes renforcent leurs mesures de surveillance pour limiter l’expansion de ces marchés parallèles, mais leurs capacités restent limitées. Le Bureau de contrôle des actifs étrangers (OFAC) des États-Unis compte environ 200 employés, un nombre insuffisant pour faire face à la complexité de ce commerce parallèle mondial. Les récentes sanctions, qui imposent aux banques de surveiller les transactions potentiellement illicites, ont accru l’efficacité du contrôle, mais des contournements restent possibles.
La stratégie américaine repose sur une approche équilibrée qui évite d’exercer une pression excessive sur des pays tiers, tels que la Malaisie et les Émirats arabes unis. Pousser ces pays dans une position antagoniste risquerait de les rapprocher davantage de la Russie ou de la Chine, avec des implications géopolitiques plus larges.
Augmentation des transactions en devises locales
L’une des conséquences notables de ces sanctions est l’abandon progressif du dollar américain dans les échanges de GNL russe. Un rapport de la Banque européenne pour la reconstruction et le développement indique une hausse significative des transactions en yuan pour les échanges de matières premières. La Russie, quatrième producteur mondial de GNL, pourrait ainsi intensifier ses exportations dans des monnaies locales, renforçant la structure de ce marché parallèle.
Les implications pour les marchés mondiaux de l’énergie
L’évolution de ce marché parallèle influence aussi les marchés mondiaux de l’énergie, où des prix différenciés apparaissent en fonction des juridictions et des régulations. Alors que certains pays, comme la Chine et l’Inde, achètent du GNL russe à prix réduit, ces économies se protègent des sanctions en utilisant des mécanismes de transaction en dehors des canaux financiers traditionnels.
Les récents développements montrent que ces transactions en monnaies locales sont non seulement un moyen de contourner les sanctions, mais aussi une stratégie économique pour certains pays. En fonction des événements géopolitiques et des changements dans les politiques internationales, l’importance de ces marchés parallèles pourrait croître, avec des impacts notables sur le marché mondial du GNL et des politiques énergétiques des pays impliqués.