Le futur dirigeant de Rio Tinto prendra ses fonctions dans un contexte marqué par une décote de valorisation représentant 40 % de la somme des actifs nets estimés par Wood Mackenzie. L’entreprise minière est confrontée depuis cinq ans à une interdiction réglementaire empêchant tout programme de rachat d’actions, mesure essentielle à la gestion de sa trésorerie et à l’allocation du capital.
Lever les barrières réglementaires
Selon James Whiteside, responsable de la recherche entreprises métaux et mines chez Wood Mackenzie, « la suppression des obstacles au rachat d’actions doit constituer une priorité pour le nouveau PDG, étant donné l’impact direct sur toutes les décisions stratégiques ». Le blocage réglementaire, lié à la participation limitée à 14,99 % de la société chinoise Aluminium Corporation of China (Chinalco), empêche les rachats depuis 2020. Cette situation limite ainsi la flexibilité financière de Rio Tinto, alors même que les rachats pourraient générer un taux de rendement interne de 16 %, soit le plus élevé parmi ses pairs du secteur minier.
Excellence opérationnelle et réduction des coûts
La deuxième priorité du nouveau PDG concerne l’amélioration immédiate de l’excellence opérationnelle. Dans les opérations de minerai de fer de la région australienne du Pilbara, Rio Tinto présente actuellement une marge inférieure de sept dollars la tonne par rapport à son concurrent direct BHP. Selon Wood Mackenzie, la réduction de seulement la moitié de ce différentiel pourrait dégager un gain annuel en EBITDA (Bénéfice avant intérêts, impôts, dépréciation et amortissement) d’un milliard de dollars jusqu’en 2030.
Optimiser la stratégie d’allocation de capital
Rio Tinto prévoit d’investir davantage que ses concurrents au cours des dix prochaines années, portant le taux de réinvestissement de 40 % à près de 60 % du flux de trésorerie opérationnel. Les principaux engagements comprennent les projets d’exploitation de minerai de fer à Simandou en Guinée, les mines de cuivre Oyu Tolgoi en Mongolie, et l’acquisition récente d’actifs de lithium pour 6,7 milliards de dollars avec la société Arcadium. Cette stratégie ambitieuse représente un défi en termes de gestion du risque et de discipline budgétaire, testant les limites de la résilience financière de l’entreprise.
Réalisme économique face aux ambitions climatiques
La quatrième priorité consiste à évaluer le réalisme économique de l’objectif de réduction de 50 % des émissions de Rio Tinto à horizon 2030, plus ambitieux que la plupart de ses concurrents qui visent 25 à 35 %. Or, avec seulement 7 % du budget d’investissement consacré à la décarbonation, l’entreprise doit recourir à des solutions commerciales générant des coûts d’exploitation supplémentaires. Le nouveau PDG devra décider du maintien ou de la révision de cet objectif face aux réalités financières.
Fusion-acquisition pour stimuler la croissance du cuivre
Enfin, la dernière priorité stratégique porte sur l’éventualité de fusions-acquisitions majeures afin de répondre au déficit prévisionnel de croissance dans le secteur du cuivre après 2028. La possibilité d’un rapprochement avec un acteur tel que Glencore permettrait à Rio Tinto de gagner en taille critique et d’améliorer sa position concurrentielle sur les marchés boursiers et des matières premières. Cependant, les décotes actuelles limitent le nombre de sociétés que Rio Tinto pourrait acquérir de manière rentable dans une opération basée sur des échanges d’actions.
James Whiteside résume : « Rio Tinto se distingue historiquement par une croissance robuste dans ses principaux secteurs de production. Toutefois, le rythme élevé des investissements actuels impose désormais des choix rigoureux en termes de gestion du capital et de dépenses, choix susceptibles d’améliorer rapidement l’évaluation boursière du groupe. »