Depuis l’invasion de l’Ukraine par la Russie, les marchés du gaz et du GNL sont fortement perturbés. Celle-ci offre de belles opportunités aux fournisseurs de GNL. De fait, ils peuvent récupérer les marchés auparavant contrôlés par la Russie et profiter de la flambée des prix.
Néanmoins, au vu du contexte actuel, se pose la question des prix du GNL. Comment les différents acteurs du marché européens parviennent à obtenir du gaz à des prix compétitif à moyen terme?
Vers une réduction du nombre de producteurs de GNL
Le nombre d’acteurs capables de produire du GNL à grande échelle se réduit. Toutefois, le Qatar reste un leader mondial.
Le Qatar, leader du marché du GNL
De plus, l’émirat consolide sa place sur la scène internationale notamment grâce à l’expansion de North Field East. Il s’agit du plus grand projet GNL de l’histoire de l’industrie, d’ici 4 ans, il fournira quelque 32 mmtpa.
En outre, les coûts unitaires figureront parmi les plus bas du marché, tout comme les émissions de carbone. De fait, le Qatar mise sur l’énergie solaire et le CCS. Ainsi, au cours des 30 prochaines années, le GNL issu de North Field East devrait être compétitif économiquement mais aussi écologiquement.
Toutefois, au vu du contexte, il pourrait s’agir de l’un des derniers projets de ce type. De fait, les projets de développement de GNL conventionnel ne sont plus forcément en adéquation avec les stratégies des groupes pétroliers. Ces derniers se tournent de plus en plus vers des projets demandant une approche progressive et modulaire des investissements. Parmi les développeurs, certains semblent plus à même d’en profiter. C’est le cas des développeurs américains qui sont en mesure d’exploiter les ressources de schiste sans investissements en amont.
Le Qatar et les États-Unis devraient se partager l’essentiel du marché
Ainsi, le Qatar et les États-Unis devraient dominer l’approvisionnement en GNL. Aujourd’hui, l’Australie est également un exportateur important de GNL. Néanmoins, le pays peine à suivre le rythme imposé par le Qatar et les États-Unis. D’autres nations ont eu l’occasion de s’immiscer dans ce cercle d’exportateurs de GNL. C’est le cas de la Russie et du Mozambique. Cependant, l’invasion de l’Ukraine par la Russie compromet cette ambition. De con côté, le Mozambique doit faire face au terrorisme qui se développe dans le pays depuis 2019 et qui bloque les différents projets de GNL.
Ainsi, le Qatar et les États-Unis se partagent le marché mondial du GNL et leur part combinée devrait encore croître dans les décennies à venir. Aujourd’hui, elle s’élève à 39% mais celle-ci devrait atteindre 50% en 2030. Doha et Washington prévoient d’augmenter leurs exportations de GNL. Ils ambitionnent d’ajouter environ 127 mmtpa de GNL supplémentaires d’ici la fin de la décennie, soit 71% de la croissance de la demande.
Face à cette tendance, les importateurs de GNL ont tout intérêt à s’inquiéter d’une telle domination. Ainsi, ils devraient trouver des alternatives et soutenir le développement d’autres options.
Le prix du GNL, une priorité pour les acheteurs
Le prix reste une priorité pour les importateurs de GNL. Néanmoins, il est de plus en plus difficile d’obtenir du GNL à un prix approprié. D’autant plus que la réglementation européenne s’accompagne de contraintes pour les acheteurs européens. La réglementation impose que les prix soient fixés sur la base d’indices sport. Ainsi, les acheteurs européens se voient forcer de renégocier les anciens contrats.
Les exportations de gaz russe, via gazoducs, vers l’Europe ont permis de maintenir les prix au comptant à des niveaux relativement bas. D’ailleurs, ceux-ci étaient inférieurs aux prix des contrats du Henry Hub et à ceux du pétrole. Néanmoins, la guerre en Ukraine vient fortement perturber les marchés du gaz.
De fait, les prix spot flambent. Ils sont désormais les plus élevés des trois. Actuellement, le TTF spot s’évalue à 30$/mmbtu. Ceci correspond à près de 4 fois la moyenne des dernières années. Ainsi, les acheteurs cherchent des alternatives permettant de réduire les coûts.
Acheter du GNL américain?
Les cargaisons américaines de GNL pourraient être livrées en Europe pour 14$/mmbtu. Elles sont alors moins coûteuses que celles liées au TTF spot, alors que les prix du Henry Hub sont actuellement élevés (8$/mmbtu). Cependant, le GNL américain pourrait ne pas être une solution miracle.
De fait, la capacité américaine de GNL est d’ores et déjà épuisée. De plus, les contrats au prix du Henry Hub ne sont disponibles que pour les projets pré-FID. Les volumes supplémentaires proviennent de projets récemment approuvés, ou qui le seront bientôt. Ainsi, ils ne sont pas accessibles aux acheteurs de GNL avant 2025 si ce n’est 2026. De surcroît, des contrats à long terme seront obligatoires. Ceux-ci devront être signés pour une durée minimale de 15 ans.
Quid des contrats liés au pétrole ?
Les contrats de GNL liés au pétrole sont de plus en plus chers. Pour un contrat débutant aujourd’hui, le taux s’élève à quelque 20$/mmbtu alors que le Brent se vend à 120$/baril. On observe alors une indexation de 17% sur le Brent, ce qui correspond à une hausse de 50% par rapport aux contrats signés l’année dernière.
Ainsi, les entreprises allemandes se tournent vers le Qatar. Toutefois, elles devront probablement signer des contrats de 10 ans et à des prix 50% plus importants que ceux d’il y a un an.
Quelles perspectives face à la flambée des prix ?
Il semble que les marchés du gaz sont face à une réelle révolution. L’ère du gaz bon marché paraît bien loin. De plus, la politique énergétique menée par l’Europe semble vouloir se détourner des contrats à moyen terme. Ainsi, les dirigeants européens devront sans doute rallonger la durée des contrats.
Toutefois, les analystes estiment que les prix du GNL finiront par baisser. Les prix du GNL spot pourraient diminuer en 2026 avec la mise en service de la nouvelle offre. Mais des incertitudes persistent, notamment concernant la Russie. En outre, il y a un risque de bulle de GNL. Ainsi, plus les prix élevés durent dans le temps et plus les risques d’une bulle de GNL augmentent. Or, un effondrement des prix au comptant déboucherait sur une nouvelle flambée des prix du Henry Hub et des contrats liés au pétrole.
Ainsi, les acheteurs sont inquiets. Ils s’efforcent alors à constituer un portefeuille à faible risque. Celui-ci doit être compétitif en termes de prix. Néanmoins, il s’agit d’une tâche extrêmement difficile au vu du contexte actuel.
Les entreprises devraient alors revenir à l’essentiel. Il est nécessaire que les services publics, mais aussi les négociants, trouvent un juste équilibre entre les contrats du Henry Hub et les contrats liés au pétrole. La diversification des portefeuilles semble ainsi être le choix le moins risqué.