Les pays pauvres ont clamé leur “déception” jeudi à la fin de pourparlers censés donner un élan à la prochaine conférence climat de novembre en Egypte, mais qui n’ont débouché sur aucune avancée notable, avec des pays riches taxés “d’hypocrisie” par les militants écolos.
Ces négociations ont duré 10 jours. Elles ont regroupé près de 200 pays à Bonn, siège de l’agence spécialisée onusienne. Il s’agissait de réfléchir à un moyen de concrétiser l’ambition affichée il y a six mois, lors de la COP26 de Glasgow.
La communauté internationale avait alors réaffirmé l’objectif – pour l’heure hors d’atteinte – de contenir le réchauffement à +1,5°C alors que nous sommes déjà à près de +1,2°C depuis que l’humanité a commencé à utiliser industriellement les énergies fossiles.
Aucune avancée notable
Mais à l’issue de ces discussions, aucune avancée notable, notamment en matière de financements. Ceux déjà promis et non tenus, mais aussi la nouvelle revendication des pays plus pauvres, les moins responsables du réchauffement mais en première ligne de ses impacts, d’un mécanisme spécifique pour prendre en compte les “pertes et dommages” que leur causent déjà les impacts du changement climatique.
La question ne sera pas à l’agenda officiel de la COP27, qui doit s’ouvrir le 7 novembre à Charm el-Cheikh, station balnéaire sur la mer Rouge. Les pays riches, souvent les plus gros émetteurs historiques, avaient bloqué cette demande à Glasgow, avec un compromis final sur la création d’un cadre de “dialogue” jusqu’à 2024 pour “discuter des modalités pour le financement”.
Idem pour les questions d’adaptation ou de réduction des émissions de gaz à effet de serre, alors que les pays doivent relever leurs engagements actuels. Ceux-ci ne permettant pas de tenir les objectifs de l’Accord de Paris de 2015 (limiter le réchauffement nettement sous 2°C, si possible 1,5°C).
Lors de la séance de clôture, le Pakistan, au nom du G77+Chine a exprimé l’”insatisfaction” des 134 pays en développement et émergents membres du groupe, notamment sur cette question des “pertes et dommages”.
“Manque de progrès”
“Nous sommes déçus par le manque de progrès (…) le rythme est trop lent, c’est trop peu, trop tard,” a renchéri le représentant de l’Alliance des petits Etats insulaires (Aosis). “Nous sommes venus à Bonn avec de grandes attentes, mais les résultats demeurent non-satisfaisants,” a fait écho le Sénégal, pour les 46 Pays les moins avancés.
“Un dialogue riche, mais sans aucun débouché concret,” a regretté la Bolivie, “profondément déçue”, pour le groupe LMDC (pays en développement), alors qu’au nom du groupe Afrique, la Zambie se disait “préoccupée par l’absence de progrès”. Les pays riches, sur la sellette, ont brillé par leur discrétion, l’Union européenne assurant s’être “engagée de façon constructive” et promettant de continuer à le faire.
Des dénégations qui n’ont pas convaincu les militants du climat présents à Bonn et pas tenus au langage diplomatique. “Les pays riches, tout particulièrement l’Union européenne, la Suisse et les Etats-Unis, ont bloqué les discussions””, a dénoncé la plus grande fédération mondiale d’ONG environnementales, Climate action network.
Des décisions fortes sont nécessaires
Collin Rees, de l’ONG Oil Change International, les a accusés “d’hypocrisie et obstruction”. “Un pays comme les Etats-Unis peut mobiliser 40 milliards pour l’Ukraine … Ce n’est pas que l’argent n’est pas là, c’est une question de priorités,” explique à l’AFP Alden Meyer, du think tank, avertissant que le dossier “est à ébullition”.
David Waskow, du World Resources Institute, appelle les leaders mondiaux à “prendre le relais” et redonner une impulsion politique lors des grands rendez-vous d’ici la COP, comme le sommet du G7, fin juin en Bavière.
“Nous avons l’obligation d’être à la hauteur de l’événement”, a lancé le représentant égyptien, hôte de la prochaine COP. “Il ne faut pas prendre le défi climatique comme une équation à somme nulle, nous demandons à chacun de se mettre à la place des autres.”
“Des décisions politiques majeures, notamment sur le financement des pertes et préjudices, doivent être prises lors de la COP27″, a renchéri la patronne de l’ONU-Climat Patricia Espinosa, espérant qu’en Egypte, les promesses importantes de l’Accord de Paris deviendront réalité”.