Les acteurs majeurs du secteur énergétique ACEN, GenZero et Keppel Ltd. annoncent un partenariat stratégique visant la conversion de la centrale à charbon South Luzon Thermal Energy Corporation (SLTEC), située à Batangas, aux Philippines. Cette initiative innovante, qui prévoit la fermeture anticipée de la centrale d’ici 2030, s’appuie sur l’utilisation de crédits de transition, un mécanisme financier destiné à accélérer la réduction des émissions de carbone.
Dans un contexte où l’Asie du Sud-Est dispose de l’une des flottes de centrales à charbon les plus récentes et les plus importantes au monde, cette démarche marque un tournant décisif. Le projet SLTEC, s’il réussit, pourrait servir de modèle pour d’autres pays de la région, en démontrant la viabilité technique et économique de la conversion des centrales thermiques traditionnelles en infrastructures d’énergie renouvelable.
Un levier financier pour la transformation énergétique
Le mécanisme des crédits de transition est au cœur de ce projet. Ces crédits, générés par la réduction des émissions de gaz à effet de serre lors de la conversion de la centrale, fourniront un financement crucial pour le démantèlement de l’infrastructure existante et l’installation de nouvelles capacités renouvelables. Le projet prévoit le remplacement des 246 MW de production baseload de SLTEC par un système intégré de production solaire et de stockage d’énergie, adapté aux besoins énergétiques fluctuants de la région.
Cette approche pourrait permettre de contourner les obstacles financiers souvent rencontrés lors de la transition énergétique, tout en favorisant une adoption plus rapide des technologies propres. Les partenaires espèrent ainsi ouvrir la voie à de futures initiatives similaires, tant aux Philippines que dans d’autres pays où la dépendance au charbon reste un défi majeur.
Enjeux sociaux et environnementaux
Le projet SLTEC ne se limite pas à une simple conversion technologique. Il intègre également des mesures destinées à atténuer les impacts socio-économiques de la fermeture de la centrale. La reconversion des employés, la réaffectation des actifs, ainsi que la gestion des conséquences pour les communautés locales font partie intégrante de l’approche adoptée par ACEN, GenZero et Keppel. Le respect des critères environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG) est un pilier fondamental de cette initiative.
En parallèle, ce projet bénéficie du soutien d’initiatives internationales telles que la Coal to Clean Credit Initiative de la Rockefeller Foundation et la Transition Credits Coalition de la Monetary Authority of Singapore. Ces collaborations assurent que les crédits de transition générés répondent aux normes les plus strictes en matière d’intégrité environnementale, tout en facilitant leur adoption sur les marchés internationaux.
Vers une stratégie régionale réplicable
L’approche innovante adoptée pour la centrale SLTEC pourrait bien servir de modèle pour d’autres projets de transition énergétique dans la région. En particulier, l’intégration des crédits de transition comme outil financier permet de surmonter des barrières économiques qui freinent souvent les projets de conversion énergétique. Ce mécanisme pourrait également être utilisé pour répondre aux exigences de l’Article 6 de l’Accord de Paris, qui permet le transfert de crédits carbone entre pays pour atteindre les objectifs climatiques fixés.
Le gouvernement singapourien a d’ailleurs exprimé son intérêt pour l’acquisition de ces crédits, sous réserve qu’ils respectent les normes rigoureuses de Singapour en matière de durabilité. Cette reconnaissance internationale pourrait renforcer la crédibilité et l’attractivité des crédits de transition, facilitant ainsi leur intégration dans les stratégies de financement des projets de décarbonation à travers l’Asie du Sud-Est.