La compagnie pétrolière franco-britannique Perenco a commencé à valoriser une portion du gaz associé issu des champs pétroliers de Badila, situés dans le bassin de Doba, au sud du Tchad. Ce gaz alimente désormais la ville de Moundou, deuxième agglomération du pays, où il est utilisé pour la production d’électricité. Ce développement s’inscrit dans un contexte où l’essentiel du gaz naturel tchadien continue d’être torché, faute d’infrastructures adaptées.
Le Tchad figure parmi les 15 pays ayant le plus fort volume de gaz torché au monde, selon les données du Global Gas Flaring Tracker. En 2023, environ 0,9 milliard de mètres cubes de gaz y ont été brûlés, contre 0,5 milliard en 2022. Cette augmentation souligne l’absence de capacité technique et industrielle pour capter, traiter et distribuer le gaz naturel, en particulier celui qui est produit de manière associée lors de l’extraction du pétrole brut.
Un modèle local de valorisation isolée
Le projet de Badila représente une initiative isolée dans un pays où aucun réseau national de collecte de gaz ni infrastructure de traitement à grande échelle n’existe actuellement. L’électricité produite à partir de cette ressource reste confinée à la zone sud, tandis que la capitale, N’Djamena, demeure largement dépendante d’autres formes d’approvisionnement énergétique.
Selon les estimations publiées par la Banque mondiale et l’Agence internationale de l’énergie, la construction d’un pipeline de transport de gaz peut nécessiter entre $1mn et $3mn par kilomètre. Une unité de traitement du gaz associé représente un investissement compris entre $150mn et $250mn, auxquels s’ajoutent les coûts de construction d’une centrale thermique à gaz, évalués à plusieurs dizaines de millions de dollars.
Des besoins énergétiques face à l’inertie des infrastructures
Dans ce contexte, la fourniture en électricité de Moundou à partir du gaz de Badila illustre à la fois le potentiel énergétique du pays et les limites structurelles de son secteur. Le Tchad, qui dispose de réserves significatives en hydrocarbures, reste confronté à un accès limité à l’électricité, en particulier en dehors des zones urbaines majeures. La situation actuelle freine les perspectives d’industrialisation et de diversification énergétique.
Le recours accru au gaz associé dans le bassin de Doba fait l’objet de discussions récurrentes dans les rapports énergétiques commandés par la Banque mondiale. Toutefois, en l’absence d’un plan national intégré de développement gazier, les initiatives comme celle de Perenco demeurent exceptionnelles. La question des investissements de base, notamment dans les réseaux de collecte, reste centrale pour toute stratégie de valorisation durable.